Est-ce un premier effet David Lappartient ? Moins d’un mois après l’élection du président de l’UCI à la tête du comité national olympique (CNOSF), la France a surpris tout le monde en annonçant via un long communiqué de presse, mardi 18 juillet en fin de journée, une candidature aux Jeux d’hiver.
Double surprise : le projet concerne les Jeux en 2030, une édition dont l’attribution a été repoussée à l’an prochain après une improbable succession de renoncements des candidats, potentiels ou annoncés.
Enfin, découverte à peine moins étonnante, le projet n’est pas seulement porté par une ville ou une vallée, mais par deux régions françaises : Auvergne-Rhône-Alpes d’un côté, Provence-Alpes-Côte d’Azur de l’autre.
Le communiqué signé par le CNOSF et son cousin paralympique, le CPSF, l’explique : « Laurent Wauquiez, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, et Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, ont aujourd’hui exprimé le souhait de proposer au mouvement sportif et à l’Etat de porter une candidature commune au Comité International Olympique (CIO) pour accueillir les épreuves des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de 2030. »
Sans la moindre surprise, les quatre porteurs du projet – les deux régions, le CNOSF et le CPSF – ont soigneusement aligné leur concept avec la nouvelle donne du CIO. Comme tous les autres, ils ont compris le message et ne se privent pas de se poser en bons élèves : la candidature française s’annonce respectueuse « des enjeux liés à la préservation de la biodiversité et à l’accélération du réchauffement climatique », elle reposera sur « les infrastructures existantes dont certaines sont issues des Jeux d’hiver d’Albertville en 1992″, enfin elle mettra en avant « la réduction indispensable des coûts d’organisation » et un financement « essentiellement par des recettes de nature privée (partenaires, billetterie, etc.). »
La suite ? Dans l’immédiat, un déjeuner à Paris, ce mercredi 19 juillet, à l’Elysée où Renaud Muselier et Laurent Wauquiez partageront le couvert avec Emmanuel Macron, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera, David Lappartient et Marie-Améie Le Fur, la présidente du CPSF. Au menu, les Jeux d’hiver.
Dans un deuxième temps, un « travail commun » sera mené dans les semaines à venir, avec l’ensemble des services concernés de l’Etat. Objectif : identifier les atouts de la candidature française, puis pouvoir « arrêter collectivement, après une large concertation, une décision mi-septembre 2023. »
En cas de poursuite du projet, encore incertaine à ce stade mais largement crédible, il reviendra au CNOSF d’exprimer au CIO son souhait d’entamer la phase de dialogue. Un projet formel de candidature sera ensuite soumis au CNOSF et au CPSF avant la fin du mois de septembre, avant d’être transmis dans la foulée à la commission de futur hôte des Jeux d’hiver du CIO.
« Au bout de ce processus, explique le communiqué, il reviendra à la commission exécutive du CIO de décider l’ouverture d’un dialogue ciblé avec certains des candidats, probablement lors de sa réunion de décembre 2023. Ce dialogue ne pourra aboutir qu’après instruction et accompagnement par l’Etat du dossier de candidature. »
La France peut-elle rafler la mise ? Dans un paysage plus dense, la réponse aurait été négative. Les deux régions françaises, longtemps concurrentes sur ce dossier, ont mis du temps à se rapprocher. Elles partent de loin.
Mais les retraits successifs des Pyrénées/Barcelone et de Vancouver, puis la pause prolongée – et sans doute définitive – de Sapporo, et enfin le souhait de Salt Lake City de pencher pour l’édition 2034, ont eu pour effet de sérieusement éclaircir le décor.
Au cours des derniers mois, la Suède, puis la Suisse, ont exprimé leur envie de tenter leur chance. Les deux pays sont entrés en phase dialogue. Mais, comme le projet français, ils sont partis tard et disposent de peu de temps pour boucler leur dossier avec toutes les garanties nécessaires. La « fenêtre de tir », pour reprendre une expression de Laurent Wauquiez, reste donc largement ouverte.
Les deux élus politiques se voient déjà comme de sérieux candidats à la victoire. « Notre objectif est d’arriver à incarner ce tournant de l’esprit de l’olympisme, assure Laurent Wauquiez, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes. On veut arriver à faire les premiers Jeux d’hiver durables. Ancrés dans les territoires, qui tournent la page au gigantisme. » Le discours n’est pas nouveau, il est même partagé par tous les postulants.
« Nous pouvons proposer un nouveau modèle des Jeux olympiques d’hiver neutre en carbone dès 2030″, plaide de son côté Renaud Muselier, le président de la région PACA.
Un coup double pour la France ? L’hiver en 2030 après l’été en 2024 ? Hier encore, l’idée aurait fait sourire. Aujourd’hui, elle est à prendre très au sérieux.