Inquiétant ? Difficile de le nier. A moins de onze mois des Jeux de Paris 2024, la Coupe du Monde de rugby 2023 en France a débuté en fin de semaine passée par une invraisemblable série de couacs dans l’organisation. Ils n’ont affecté ni le jeu ni les joueurs. Mais la désormais sacro-sainte « expérience spectateurs », brandie comme un signe de ralliement par tous les organisateurs de grands événements sportifs, en a pris un sérieux coup.
En tête de liste : les transports et l’accès au stade. A Marseille et Bordeaux, deux des villes-hôtes, le Mondial 2023 a débuté samedi 9 septembre par des images de pagaille et de confusion. Dans les deux cas, une partie du public a manqué le début de la rencontre.
A Marseille, une mauvaise gestion des flux et des problèmes techniques ont perturbé l’entame du match entre l’Angleterre et l’Argentine, l’un des sommets de la phase préliminaire. Plusieurs milliers de fans ont été bloqués aux portes du Stade Vélodrome. Commentaire sans complaisance de l’ancien international anglais Brian Moore : « L’organisation au stade était plus que douteuse. »
Le lendemain, les organisateurs ont reconnu les faits et fait amende honorable, assurant que « des mesures avaient été prises pour améliorer l’accès au stade. » Le nombre de volontaires sera revu à la hausse. Il est également prévue de renforcer les annonces dans les transports. Marseille accueille six rencontres du Mondial 2023, dont deux quarts de finale.
Dans un premier temps, World Rugby a pointé du doigt le comportement des supporteurs anglais, coupables à ses yeux de s’être présentés « en grand nombre assez tard et principalement à une seule des deux entrées prévues ». Mais l’instance a rectifié le tir après la rencontre, expliquant « travailler avec toutes les parties pour comprendre ce qu’il s’est passé et prendre des mesures pour éviter de nouveaux retards. »
Seconde zone d’ombre : Bordeaux. Une ville rugby, une vraie. Mais le tournoi a débuté sur un faux rythme, samedi 9 septembre, pour le match entre l’Irlande et la Roumanie. En cause, les transports. Les supporteurs irlandais, disciplinés et respectueux des consignes, avaient choisi le tramway pour se rendre au stade. Ils peuvent le regretter.
L’opérateur métropolitain, TBM, l’a reconnu dans un communiqué : deux incidents ont perturbé le trafic des tramways en direction du stade. Une rame est tombée en panne à 14 h 15, un peu plus d’une heure avant le début du match. Elle a été remise en service un quart d’heure plus tard. Puis un autre tramway a été arrêté en pleine voie après que des voyageurs aient « actionné l’arrêt d’urgence » à deux stations du stade. Ce deuxième incident s’est produit à 45 minutes du coup d’envoi. Résultat : les deux rames suivantes bloquées. Et l’obligation pour les spectateurs de boucler le trajet à pied.
Autre couac, plus subjectif : la cérémonie d’ouverture, vendredi 8 septembre au Stade de France, avant le choc entre les Bleus et les All Blacks. Le comité d’organisation l’avait voulue très imprégnée par le terroir, représentative d’une France du rugby portant le béret et n’abandonnant jamais sa baguette de pain. Une France des années 50, tournée vers son passé et habillée de nostalgie.
Dans le stade, le public a semblé apprécier. Ailleurs, l’impression a été plus mitigée. « Allez la Rance », a titré le quotidien Libération.
La question des hymnes nationaux a déchainé elle aussi les critiques. Les organisateurs ont fait le choix de faire appel à des chorales d’enfants, dans le cadre de l’opération « La mêlée des chœurs. » Intention louable, mais résultat décevant. Au Stade de France comme ailleurs, les hymnes ont été jugés inaudibles, voire totalement faux.
A Saint-Etienne, le Fratelli d’Italia joué pour l’entrée en lice de l’Italie a cristallisé les critiques. « On ne peut pas faire chanter les hymnes normalement s’il vous plaît ?, s’est emporté l’ancien international Mirco Bergamasco. Le plus important, ce sont les joueurs… C’est un moment unique ! ». Même incompréhension pour Francesco Pierantozzi, le commentateur de la chaîne Sky Sport : « D’accord pour faire quelque chose de différent mais, dans un hymne, il y a de la solennité, de l’émotion. C’était un désastre, un fiasco… »
Interrogée lundi 11 septembre sur FranceInfo, la ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra n’a pas botté en touche. Elle a reconnu les incidents. « Il y a eu plusieurs ratés opérationnels qu’il ne faut pas minimiser dans l’organisation, samedi, mais heureusement aucun incident majeur n’est survenu, a-t-elle expliqué. Il y a encore des ajustements supplémentaires qui doivent être apportés, dont le renforcement des équipes de volontaires. »