La tendance peut surprendre, par ses règles du jeu souvent très peu lisibles, mais elle se renforce : sur le dossier des candidatures aux événements majeurs, le mouvement sportif ne veut plus de perdant. Le CIO a ouvert la voie, en 2017, par son double vote pour les Jeux d’été en 2024 et 2028. La FIFA vient d’élargir encore la brèche, sans retenir ses coups de burin.
L’instance internationale du football a dévoilé, mercredi 4 octobre, les pays-hôtes du Mondial masculin en 2030. On en attendait trois ou quatre, sans trop savoir s’ils seraient sud-américains (Argentine, Chili, Uruguay et Paraguay), en reconnaissance de l’histoire du tournoi, ou plutôt issus d’une alliance entre l’Europe et l’Afrique du Nord (Espagne, Portugal et Maroc). La FIFA en a sorti six de son immense chapeau.
Pour la première fois depuis sa création, le Mondial de football se disputera en 2030 dans six pays et sur trois continents. Au mépris des priorités environnementales, les 104 rencontres de la compétition seront réparties entre l’Europe – Espagne et Portugal – l’Afrique – Maroc – et l’Amérique du Sud – Argentine, Paraguay et Uruguay.
A l’image du CIO, soucieux de ne pas faire de perdant entre Paris et Los Angeles, la FIFA a choisi de ne renvoyer (presque) personne les mains vides et l’âme en peine. Le trio formé de l’Espagne, du Portugal et du Maroc hérite de la part la plus épaisse du gâteau. Avec 101 rencontres sur les 104 du tournoi, il a raflé la mise. Mais les trois nations sud-américaines, dont le dossier était devancé par son rival, ne sont pas oubliées. En échange de leur renoncement, elles recevront les trois premiers matches. Une façon très inattendue de sauver la face et de pouvoir célébrer le centenaire d’un événement né en 1930 à Montevideo, en Uruguay.
« Le premier de ces trois matches sera, bien sûr, joué au stade où tout a commencé, le mythique Estadio Centenario de Montevideo, précisément pour célébrer la centième édition de la Coupe du Monde », a déjà fait savoir Gianni Infantino.
Le communiqué de la FIFA l’assure : cette formule encore jamais imaginée dans le mouvement sportif a fait « l’unanimité » parmi les membres du Conseil de l’instance. Les détails techniques ne sont pas encore connus. Ils s’annoncent complexes. Et l’attribution officielle ne se fera pas avant la fin de l’année 2024. Mais l’affaire est pliée. Elle ne sera plus remise en question, malgré l’avalanche de questions et de doutes soulevés par un tel projet, notamment en termes de logistique, de coûts et de programmation sportive.
Détail tout sauf anodin : comme les trois réels pays-hôtes – Espagne, Portugal et Maroc -, les trois nations sud-américaines sont assurées de participer au Mondial 2030. La FIFA a précisé jeudi 5 octobre qu’elles auront leur ticket sans en passer par les qualifications.
A l’heure des comptes, la formule imaginée par la FIFA ne fait qu’un seul perdant, sur les sept postulants retenus pour le dernier tour de piste. Le Chili, associé de longue date à l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay au sein de l’alliance sud-américaine, a été oublié au moment de la distribution des lots.
Quant à l’Ukraine, un moment intégrée au projet de l’Espagne et du Portugal, elle avait déjà abandonné la course, remplacée par le Maroc à la mi-mars dernier. Avec elle, le Mondial aurait marché sur deux continents. Avec le Maroc, il en traversera trois. Au risque de s’y perdre.