Le CIO l’a officialisé lors de la 141ème session, à la mi-octobre à Mumbai : un double vote décidera l’an prochain de l’attribution des Jeux d’hiver en 2030 et 2034. Pour la deuxième édition, Salt Lake City a déjà presque course gagnée. La ville américaine pourrait même être seule en lice. Pour 2030, en revanche, la bataille reste très incertaine entre la Suède, partie la première, la Suisse et son projet national, et les deux régions françaises, Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA).
Aux commandes de la candidature française, David Lappartient (photo ci-dessus). Le président de l’UCI et du comité national olympique (CNOSF) semble plus investi que jamais dans une campagne où les prochaines semaines s’annoncent décisives. Il a répondu aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux : Où en est aujourd’hui le dossier de candidature des Alpes françaises ?
David Lappartient : On avance bien. La commission des futurs hôtes nous auditionnera le 21 novembre. Avant cela, nous devrons déposer le dossier final, sans doute le 7 novembre. Nous avons déjà rendu un pré-dossier au CIO, vendredi 13 octobre. La commission exécutive se réunira du 29 novembre au 1er décembre à Paris. Elle choisira avec qui poursuivre en phase de dialogue ciblé. Nous sommes dans les temps.
Le pré-dossier déposé au CIO incluait-il une carte des sites ?
Bien sûr. Je ne peux pas encore la dévoiler, car nous continuons à avancer. Mais à part deux éléments, tout est calé. Le partage des sites entre les deux régions est très équilibré. Il y a eu des discussions avec les présidents de région et avec les élus. Nous avons regardé les sites qui avaient déjà accueilli des championnats du monde, ceux qui possèdent des équipements homologués. Ca n’est pas trahir un secret, le bobsleigh sera à La Plagne. Nous sommes partis dans une logique d’utiliser soit des sites existants, soit des expertises reconnues. Le sujet de l’anneau de vitesse reste en suspens. Nous avons deux options : un site temporaire, façon palais des expositions, avec assez de place pour mettre un ovale, ou aller à l’étranger. Les deux options sont ouvertes, mais nous n’aurons sans doute pas la réponse lors de notre dépôt de dossier.
Où en est le budget ?
Il n’est pas établi. On ne veut pas donner un budget trop tôt. L’erreur serait de le communiquer sans avoir chiffré l’ensemble des éléments. Les candidats ont parfois tendance à minimiser le coût en phase de candidature, puis les gens disent que les Jeux coûtent plus cher que prévu. Je suis plutôt dans la logique de prévoir des Jeux qui coûtent le moins cher possible, mais d’annoncer aussi le budget le plus réaliste possible.
Qui travaille aujourd’hui sur le dossier ?
Une petite équipe. Je suis moi-même très impliqué, notamment dans les relations avec Renaud Muselier et Laurent Wauquiez (présidents des régions PACA et AURA), avec l’Etat et avec les fédérations, car la candidature est juridiquement portée par le CNOSF. J’y passe beaucoup de temps. Au CNOSF, nous avons quatre personnes dessus, dont deux à 100 %, plus le directeur général et le conseiller. Les deux régions ont également une petite équipe. En tout, une dizaine de personnes travaillent sur le dossier. A part Vincent Jay (champion olympique de biathlon en 2010), qui a rejoint la région AURA pour cette candidature, les gens étaient déjà présents. Nous communiquerons plus tard le coût de cette candidature. Il sera historiquement bas.
La décision du CIO d’un double vote 2030-2034 vous est-elle favorable ?
Je crois, oui. Au moment de l’attribution, fin 2024, il restera seulement un peu plus de cinq ans avant les Jeux. C’est très court. Avec ce double vote, le CIO se redonne de l’air. Et, avec lui, les athlètes et les fédérations. Pour les candidatures, cela donne aussi plus d’espace. Au lieu d’être quatre pour une édition, celle de 2030, nous sommes trois plus un.
Vous avez toujours affiché une grande confiance dans cette candidature. Est-elle aujourd’hui à la hausse ?
Nous sommes confiants car nous avons un bon dossier. Mais nous avons des concurrents sérieux. La Suède et la Suisse, techniquement, sont des pays sérieux, qui savent organiser des grands événements internationaux. Je n’ai pas de doute qu’il sauront faire un bon dossier. Nous devrons mettre en avant nos qualités, dont la capacité de décision en France. Notre système de décision peut être parfois plus efficace, tout comme la capacité d’engagement de l’Etat et des collectivités, notamment sur le plan financier. Nous avons aussi une profondeur de marché économique. Un tiers du budget est à chercher dans le secteur privé. Pour cela, il faut des ressources économiques dans le pays. Nous avons sans doute pour cela plus d’opportunités que nos deux concurrents.
Une opposition se manifeste et se fait entendre dans les deux régions concernées, notamment de la part d’associations écologistes. Est-ce un obstacle ?
Jean de la Fontaine disait : « On ne peut pas contenter tout le monde et son père ». Il y aura des gens contre les Jeux olympiques, contre le principe même des Jeux. Je respecte leur point de vue. Nous n’arriverons pas à les convaincre. Mais je veux leur dire que les Jeux de Paris 2024 marquent une vraie transition du modèle olympique : moins cher, plus durable. C’est encore plus vrai pour les Jeux d’hiver. Avec les deux présidents de région, nous sommes allés voir Emmanuel Macron pour lui expliquer que nous ne construirons aucun équipement nouveau, sauf s’il y a un besoin pour des questions d’héritage. Paris 2024 a marqué une révolution pour les Jeux d’été. L’idée est de jouer le même rôle pour ceux d’hiver. Proposer nous aussi une révolution. Nous avons réalisé des sondages. En région AURA, le taux de soutien est de 81 %, donc une très large majorité. Il ne faut pas oublier que la démocratie est aussi le fait majoritaire.