Dix ans. L’Union mondiale des villes olympique célèbre la semaine prochaine à Paris (27 au 29 novembre), ville-hôte des prochains Jeux d’été, la première décennie d’existence de son rendez-vous annuel, le Smartcities & Sport Summit. Il s’annonce comme une édition historique, avec plus de 300 participants et une trentaine d’intervenants. En tête de liste, Thomas Bach, le président du CIO.
FrancsJeux a interrogé Mélanie Duparc, la secrétaire générale de l’Union mondiale des villes olympiques.
FrancsJeux : En dix ans d’existence du Smartcities & Sport Summit, quel en a été le plus grand changement ?
Mélanie Duparc : Le réseau des smartcities & sport a été créé, à l’origine, pour répondre aux besoins des villes olympiques. Une fois les Jeux Olympiques organisés, elles se retrouvent face au même défi que n’importe quelle autre ville qui souhaite intégrer le sport pour son développement urbain et le bien de ses communautés. Nous avons donc élargi le réseau à toutes les villes, grandes, petites, avec ou sans ambition olympique. Pour répondre à ces besoins, nous avons toujours essayé de couvrir des thématiques très larges : la santé, le tourisme, l’éducation, le marketing, l’urbanisme… Cette approche n’a pas changé en dix ans. En revanche, nous avons ajouté une autre idée, celle de créer un réseau de réseaux. Depuis quelques années, nous nous appuyons sur d’autres relais et compétences, en créant des partenariats avec des organisations nationales dédiées aux villes et au sport, notamment au Danemark, aux Etats-Unis, au Japon. Ces relais d’expertises apportent beaucoup au réseau smartcities & sport.
Il est aujourd’hui beaucoup question d’héritage et de durabilité dans les villes olympiques. Ces thèmes étaient-ils déjà évoqués dix ans en arrière ?
On en parlait déjà, mais différemment. L’héritage a toujours été au coeur des travaux et des discussions de l’Union mondiale des villes olympiques. Nous évoquions l’héritage de façon large, car nous regroupons des villes ayant eu les Jeux plus de 100 ans arrière, et d’autres les ayant organisés récemment. Nous avons commencé à travailler là-dessus avant que le CIO ne précise sa définition et l’intègre avant, les phases des JO, avant pendant, après. . Je dirais la même chose de la durabilité. Nous en parlons depuis longtemps, mais ce thème était surtout lié aux questions environnementales. Aujourd’hui, la durabilité englobe un champ plus large. Elle concerne notamment les aspects sociaux et économiques, qui seront notamment beaucoup abordés lors du sommet du smartcities & sport summit, cette année
Comment assurer un héritage à long terme lorsque, dans le même temps, le CIO incite les villes hôtes ou candidates à ne plus construire de nouveaux équipements ?
Le CIO l’a compris : l’intérêt des villes est aujourd’hui de limiter les constructions. Pour des raisons de coûts, mais pas seulement. Une ville hôte doit définir les besoins de ses habitants, et profiter des Jeux pour y répondre, sans chercher à aller au-delà. Pour cette raison, la notion d’héritage a changé. Elle n’est plus focalisée sur les sites et les équipements, mais aussi sur la pratique sportive, la jeunesse, l’inclusion… L’héritage se construit aussi beaucoup plus tôt dans le temps. Il précède l’événement. Los Angeles et Dakar en apportent aujourd’hui la preuve, en faisant vivre l’héritage des Jeux de 2028 et des JOJ en 2026 dès aujourd’hui, plusieurs années avant l’événement.
Smartcities & Sport Summit fête son dixième anniversaire à Paris, la prochaine ville olympique. La capitale française va-t-elle incarner un tournant dans la façon de recevoir des Jeux olympiques et paralympiques ?
Certainement. La démarche du COJO Paris 2024 marque un vrai changement. Les prochains Jeux d’été seront les premiers à s’inscrire pleinement dans les résolutions de l’Agenda 2020 du CIO. Ils seront aussi les premiers alignés sur l’accord de Paris sur le climat. Le COJO affiche une volonté d’être exemplaire pour l’impact carbone, avec son projet de réduire de moitié les émissions de CO2. Les Jeux de Paris 2024 seront aussi les premiers à s’appuyer sur 90 % de sites existants ou temporaires. La stratégie mise en place en termes de pratique sportive, avec le programme national de 30 minutes de sport par jour à l’école, se veut également exemplaire pour assurer un héritage des Jeux dans la société.
A moins de 10 mois des Jeux de 2024, quel sera selon vous le principal impact de l’événement sur la ville de Paris ?
L’impact le plus visible, et aussi le plus médiatique, est d’avoir rendu la Seine propre à la baignade. Cela va redéfinir le visage de Paris. Les Jeux contribuent aussi à un profond renouvellement urbain, à Paris même avec la nouvelle Arena de la porte de la Chapelle, et en Seine-Saint-Denis avec la construction d’un village des athlètes destiné à devenir un lieu d’habitation. Un autre impact des Jeux, peut-être moins visible, est d’avoir servi d’accélérateur pour l’égalité des genres, l’accessibilité, la responsabilité sociale.
La question de l’inclusion est de plus en plus mise en avant dans les villes hôtes des Jeux olympiques, donc paralympiques. Est-ce un mythe ou une réalité ? Les Jeux peuvent-ils vraiment changer le regard sur le handicap et sa place dans la société ?
Pour changer le regard sur le handicap, il faut commencer par regarder le handicap. Les événements sportifs inclusifs, à commencer par les Jeux paralympiques, mettent en avant et en valeur des personnes en situation de handicap. Ils les rendent visibles. Ca n’est pas si fréquent. Les Jeux paralympiques jouent aussi un rôle d’accélérateur pour l’accessibilité d’une ville. Avant les Jeux de 2020, Tokyo a réaménagé son espace urbain, en rendant plus accessibles les gares, les trottoirs… Un même travail est fait à Paris pour les Jeux de 2024.