L’exercice lui est devenu familier. Depuis son élection à la présidence du CIO, lors de la session de septembre 2013 à Buenos Aires, Thomas Bach a pris l’habitude de visiter le village des athlètes des Jeux, hiver comme été, avant la cérémonie d’ouverture. Il le fait à la façon d’un chef d’Etat, suivi par les caméras, enveloppé par le regard protecteur d’un service d’ordre. Mais sans jamais s’interdire de briser le protocole par quelques touches personnelles.
Mercredi 17 janvier, le dirigeant allemand a respecté sa propre tradition. Il s’est offert en fin de matinée un tour presque complet de l’un des deux villages des athlètes des Jeux de la Jeunesse d’hiver de Gangwon 2024 (19 janvier au 1er février), installé sur le campus austère mais ramassé de l’Université Wonju de Gangneung. Une visite de plus d’heure, bouclée par un déjeuner sans cérémonial à la cafétéria du village, entre deux tablées d’athlètes.
Sauf retournement de l’histoire, Thomas Bach n’en connaîtra plus qu’une. En juillet prochain pour les Jeux de Paris 2024. La visite suivante, aux Jeux d’hiver de Milan-Cortina 2026, reviendra à son successeur à la tête du CIO, à designer lors de la session d’Athènes en 2025.
A Gangneung, mercredi, Thomas Bach a semblé vouloir profiter sans retenue de l’exercice. Escorté par une colonie d’envoyés du CIO aussi nombreuse que les représentants des médias, il a multiplié les échanges avec les athlètes, distribuant à chacun d’eux un pins en forme de coeur marqué des cinq anneaux olympiques.
Un premier arrêt à la salle de fitness pour une brève conversation avec des jeunes espoirs polonais, puis un deuxième dans l’espace de convivialité pour s’entretenir avec trois sélectionnées portant les couleurs de l’Ukraine. A l’une d’elles, il a demandé le jour et le lieu de son épreuve. Avant de lui assurer, hilare : « J’y serai, je viendrai vous encourager. Si vous entendez quelqu’un vous supporter très bruyamment depuis les tribunes, ça sera moi ! »
Sur le chemin d’un des bâtiments du village, pour une découverte des chambres des délégations, Thomas Bach n’a pas résisté à l’envie de questionner les joueuses australiennes de hockey sur glace sur l’origine de leur passion, dans un pays peu connu pour sa culture du palet (photo ci-dessus). « Nous avons aussi des patinoires », a répondu l’une d’elles, avant de préciser que sa première crosse lui avait été confiée par son père, lui-même hockeyeur.
Face aux médias, le président du CIO a déroulé avec des airs d’habitué un discours maintes fois entendu. Il a parlé d’héritage. Prévisible et routinier. Mais à Gangneung, où sont concentrées les disciplines de glace, comme à PyeongChang où se tiendront les épreuves de neige, le propos n’a rien d’un banal concentré d’éléments de langage. Il sonne juste.
Six ans après les Jeux d’hiver de PyeongChang 2018, la Corée du Sud ressert au CIO, et aux près de 2000 jeunes athlètes venus de 79 pays, un décor déjà connu du mouvement olympique. Les sites de compétition n’ont pas pris une ride. Grande première dans l’histoire des Jeux : ils serviront une deuxième fois en moins d’une décennie. Tout juste semblent-il trop parfois grands, presque démesurés, pour un événement aux dimensions volontairement modestes.
« L’héritage est d’abord celui des sites, a expliqué Thomas Bach. Tous ceux qui, comme moi, étaient présents aux Jeux de PyeongChang 2018 n’imaginaient pas revenir six ans plus tard pour un autre rendez-vous olympique. Mais l’héritage n’est pas seulement celui des équipements. Il est aussi plus immatériel. Il se traduit par l’attractivité grandissante des sports d’hiver en Corée du Sud, et plus largement sur le continent asiatique. Mais aussi par la volonté de nos hôtes sud-coréens de contribuer à l’universalité de ces disciplines, en ayant invité des jeunes athlètes de pays sans neige et glace à s’entraîner, et ainsi pouvoir se qualifier, pour les Jeux de la Jeunesse d’hiver. »
La Tunisie en fait partie. A Gangwon 2024, elle sera présente pour la première fois dans l’épreuve du bobsleigh. Une autre forme d’héritage.