L’Ukraine avait prévenu, après la décision du CIO prise à la fin du mois de novembre dernier d’accepter sous conditions des athlètes neutres portant un passeport russe ou biélorusse aux Jeux de Paris 2024 : elle n’allait pas rester les bras croisés et accepter une telle perspective.
Dimanche 3 février, les autorités ukrainiennes ont tenu parole. Elles ont repris la main dans le débat en publiant, sur le site Internet officiel du ministère des Sports, une liste de sportifs et officiels russes et biélorusses ayant soutenu l’offensive militaire.
L’initiative de Kiev a coïncidé avec l’organisation dans la ville norvégienne de Trondheim d’une conférence internationale, « Play the Game 2024 », dédiée à la promotion de « la démocratie, la transparence et la liberté d’expression dans le sport mondial ».
La liste ratisse très large. Elle concerne 52 sports, dont seulement une vingtaine olympiques, hiver et été. Elle ajoute une catégorie pour les officiels sportifs, dont l’absence des Jeux de Paris 2024 est pourtant déjà actée. Enfin, elle mélange sportifs actuels, donc susceptibles d’obtenir leur qualification pour les compétitions olympiques, et champions retraités.
Pour chacun des noms présents sur cette liste noire, les autorités ukrainiennes présentent en quelques mots le parcours sportif, avant de détailler plus longuement les raisons de leur inscription dans le fichier, coupures de presse ou captures d’écran issus des réseaux sociaux à l’appui.
Sans grande surprise, les deux membres russes du CIO figurent dans le listing. L’ancienne perchiste Yelena Isinbaeva (photo ci-dessus), membre de la commission des athlètes de l’instance olympique, est présentée comme appartenant tout à la fois aux forces armées russes, avec le grade de major, et au club sportif central de l’armée. Le ministère des Sports ukrainien relève qu’elle « continue de représenter la Russie en tant que membre du Comité international olympique ».
L’autre membre russe du CIO, Shamil Tarpishchev, doit sa présence sur la liste à son soutien public à « la décision de Vladimir Poutine de se mobiliser pour la guerre contre l’Ukraine ». Il est également critiqué pour avoir « approuvé l’idée de créer des unités militaires composées d’athlètes professionnels pour participer à la guerre en Ukraine ».
Toujours au rayon CIO, mais dans les rangs des membres honoraires, figure l’ancien nageur Alexander Popov. Il lui est reproché d’avoir organisé, puis participé, à la cérémonie d’ouverture des championnats de natation de Rosgvardia. « La coupe remise lors de l’événement a été nommée en son honneur, dans un contexte de guerre intense entre la Russie et l’Ukraine », pointe le ministère ukrainien des Sports.
Moins inattendue, la présence du nageur Evgeny Rylov, double médaillé d’or aux Jeux de Tokyo 2020 (100 et 200 m dos) sous les couleurs du ROC. Sa fiche relève qu’il a « publiquement exprimé son soutien aux actions de la Russie en Ukraine et participé à des événements de masse visant à justifier l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine. » Il a notamment été vu à un concert en l’honneur de l’annexion de la Crimée et du soutien à la guerre en Ukraine, au stade Luzhniki, où il arborait sur ses vêtements la lettre « Z » associée au mouvement « Zhogolev », un groupe pro-russe de soutien à l’annexion des territoires ukrainiens.
A lui seul, le patinage artistique contribue pour 29 noms à la liste établie par les autorités ukrainiennes. Parmi eux, Kamila Valieva, la jeune patineuse récemment suspendue pour quatre ans pour dopage par le Tribunal arbitral du sport (TAS), et Evgeniy Plushenko, champion olympique individuel aux Jeux de Turin 2006.
Stanislav Pozdnyakov, le président du Comité olympique russe (ROC), figure sans la moindre surprise dans le collimateur de l’Ukraine, tout comme Umar Kremlev, le président de l’IBA, et Vladimir Lisin, l’ancien président de la Fédération internationale de tir (ISSF). Pour ce dernier, le ministère ukrainien relève, à tort, qu’il est membre de la commission des revenus et partenariats commerciaux du CIO. Le site Internet de l’instance ne mentionne en effet pas son nom parmi les membres de la commission.