— Publié le 20 juin 2024

Erriyon Knighton, une affaire qui en rappelle une autre

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Un hasard du calendrier, rien de plus. Mais il pose question. A un peu plus d’un mois des Jeux de Paris 2024, la rubrique dopage s’est enrichie mercredi 19 juin de deux nouveaux dossiers. Ils concernent les deux pays censés batailler pour la première place du classement des médailles dans la capitale française. Les Etats-Unis et la Chine. Pas les meilleurs amis du monde.

La Chine, d’abord. Son comité national olympique a dévoilé la composition de son équipe de nageurs pour les Jeux de Paris 2024. Elle compte 31 noms. Parmi eux, une poignée de sérieux prétendants au podium. En tête de liste, le sprinteur Pan Zhanle, inattendu détenteur du record du monde du 100 m nage libre depuis le début de l’année (46 sec 80) ; la spécialiste du 200 m papillon Zhang Yufei, championne olympique en titre ; le médaillé d’or sur 200 m 4 nages aux Jeux de Tokyo 2020, Wang Shun ; le brasseur Qin Haiyang, triple champion du monde en 2023 (50, 100 et 200 m brasse). Costaud.

Jusque-là, rien de très inattendu. La Chine enverra tous ses cracks à Paris. Le contraire aurait été un scoop. Seul ennui : la présence dans la sélection olympique de 11 des 23 nageurs contrôlés positifs en 2021, avant les Jeux de Tokyo, mais blanchis par l’Agence mondiale antidopage (AMA) sur la foi d’une enquête ayant conclu à une contamination alimentaire.

Révélée par la chaîne allemande ARD et par le New York Times, l’affaire a fait grand bruit. Elle a surtout très vite tourné à une guerre de déclarations, de communiqués et d’accusations entre l’AMA et l’Agence américaine antidopage (USADA). Les Etats-Unis ont accusé l’AMA de rouler pour la Chine. L’agence basée à Montréal a répliqué sans retenir ses coups. Son ancien président, le Canadien Richard Pound, l’a relevé : « L’USADA est financée par le gouvernement américain et ce gouvernement entretient actuellement une relation très froide avec le gouvernement chinois. Est-ce qu’il pourrait y avoir un lien ? »

Plus récemment, Katie Ledecky a apporté sa voix au débat. « C’est difficile d’aller à Paris en sachant que nous allons concourir avec certains de ces athlètes », a déclaré lors d’une émission télévisée la plus titrée des nageuses américaines.

Pas faux. Mais, très gênant pour les Etats-Unis, une affaire vraiment très comparable à celle des nageurs chinois touche aujourd’hui un athlète américain. Pas le moindre : Erriyon Knighton, le nouveau crack du 200 m, médaillé d’argent l’an passé aux championnats du monde à Budapest (photo ci-dessus).

Sérieux candidat au podium aux Jeux de Paris 2024, le sprinteur a été contrôlé positif lors d’un test antidopage réalisé hors compétition, au mois de mars dernier. Mais l’USADA, après examen de son cas, a décidé de ne pas le suspendre. La raison ? L’agence a estimé que la présence dans son échantillon d’un produit interdit était le résultat d’une… contamination alimentaire. Et oui, ça arrive.

Toujours prompt à accuser les pays étrangers, le directeur de l’USADA, Travis Tygart, a avancé une explication qui ressemble beaucoup à celle produite par les autorités sportives chinoises. Il a précisé qu’une enquête avait été menée, qu’elle avoir découvert que la viande contaminée provenait d’un magasin du centre de la Floride. L’USADA a testé la viande, interrogé le gérant de l’établissement, puis Erryion Knighton, sa petite amie et sa mère.

« Nous avons fait ce que les règles nous imposent de faire dans tous les cas positifs, a déclaré Travis Tygart. Nous pouvons nous féliciter que la justice ait été rendue et que nous ayons fait preuve de la transparence requise par les règlements. »

Blanchi par l’USADA, Erriyon Knighton pourra s’aligner aux sélections olympiques américaines, qui débutent vendredi 21 juin à Eugene, dans l’Oregon. Il bénéficie du même régime que les nageurs chinois.

La réponse de l’AMA ? Elle ne devrait pas trop se faire attendre. James Fitzgerald, son responsable des relations avec les médias, l’a expliqué : « Comme elle le fait toujours, l’AMA va examiner cette affaire et se réserve le droit de faire appel, si nécessaire, auprès du Tribunal arbitral du sport. »

Interrogé par Reuters, l’avocat d’Erriyon Knighton, Howard Jacobs, a assuré qu’il était prêt à répondre à un appel, qu’il vienne de l’AMA ou d’ailleurs.