Candidatures

Pour Salt Lake City 2034, tout est bon, sauf les chiffres

— Publié le 25 juin 2024

La date a pu passer inaperçue, masquée par un autre compte-à-rebours. Mais les deux candidatures retenues par la commission exécutive du CIO pour les Jeux d’hiver – les Alpes françaises pour 2030, Salt Lake City pour 2034 – ont désormais moins d’un mois à patienter avant le grand jour. Elles seront désignées officiellement régions et ville hôtes le 24 juillet par la session de l’instance olympique. Le suspense a disparu depuis longtemps.

Pour le projet français, la situation politique depuis les élections européennes et la dissolution de l’Assemblée nationale complique le travail de l’équipe de candidature. Une pièce manque toujours au dossier : les garanties de l’Etat. Il n’est pas exclu qu’elle soit toujours manquante à l’ouverture de la session. Mais le CIO saura s’en accommoder, et trouver une formule pour l’expliquer. A moins de six ans des Jeux d’hiver 2030, toute idée de plan B n’est plus d’actualité du côté de Lausanne, garanties ou pas.

Pour Salt Lake City, le terrain s’annonce plus dégagé. Le dossier coche toutes les cases. La publication par le CIO du rapport de la commission du futur hôte sur la candidature de la capitale de l’Utah l’illustre : les Américains ont toute la confiance du CIO.

Très technique, le document met volontiers en avant les nombreux atouts d’un projet qui semble avoir été préparé sans quitter des yeux les recommandations de l’Agenda 2020+5 du CIO. Lausanne note que le modèle proposé par Salt Lake City 2024 s’appuie, comme celui de Los Angeles 2028, sur un financement exclusivement privé (hors dépenses liées à la sécurité des Jeux).

Le rapport relève également que l’Utah n’a jamais relâché ses efforts dans le domaine sportif depuis les Jeux d’hiver 2002 à Salt Lake City. Sa commission des sports a « soutenu plus de 1.100 événements, dont 175 compétitions de haut niveau, Coupes du Monde ou championnats. »

La commission présidée par l’Autrichien Karl Stoss pointe que les Jeux d’hiver en 2034 « contribueraient à répondre aux besoins d’une ville et d’une région qui ont connu d’énormes changements sociétaux. » Avec une moyenne d’âge de 31 ans, l’Utah est l’Etat affichant la population la plus jeune du pays.

Surtout, le CIO se félicite de voir que les Jeux d’hiver en 2034 seront les premiers organisés en totalité dans des sites existants ou temporaires, tous à moins d’une heure du village olympique. Dix des 13 sites de compétition proposés dans le plan directeur avaient servi pour les Jeux en 2002. Les mises à niveau nécessaires pour certains équipements de compétition s’avèrent modestes. Il en coûterait seulement 33 millions de dollars pour moderniser la piste de glisse, les tremplins de saut à ski, l’ovale de patinage de vitesse et le centre nordique de Soldier Hollow. Trois fois rien.

Toutes les cases, donc. Une copie presque parfaite. Mais, méfiance, le CIO ne fait pas mystère de certaines réserves. En analysant les chiffres, Karl Stoss et son équipe ont froncé les sourcils. Le budget, surtout, les laisse sceptiques.

A un peu moins de dix ans de l’échéance, Salt Lake City annonce le chiffre de 1,8 milliard de dollars de recettes en partenariat national. Presque le double que l’objectif affiché – et semble-t-il dépassé – par Paris 2024. Pour des Jeux d’hiver, Salt Lake City voit grand, même très grand. La commission de futur hôte estime que l’ambition de l’Utah est très optimiste, sans doute trop, même en tenant compte de l’inflation et d’un marché américain très porteur dans le domaine du sport.

Même doute quant à la billetterie. Salt Lake City prévoit des recettes de 1,19 milliard de dollars pour la vente des places et l’hospitalité. Le CIO n’y croit pas vraiment.

Les dépenses ? Karl Stoss fait là aussi un peu la grimace. Le CIO écrit noir sur blanc que le budget des transports et celui de la technologie ont sans doute été sous-évalués.

Enfin, l’Autrichien a failli tomber de sa chaise en découvrant les prévisions affichées par l’équipe de Salt Lake City 2034 pour les prix des chambres d’hôtel pendant la période des Jeux d’hiver en 2034. Il en coûtera 313 dollars pour une chambre dans un établissement 2 étoiles, 439 dollars pour une étoile de plus, et 762 dollars dans un 4 étoiles. Pas donné.