Le CIO ne cite même plus son nom en conférence de presse, préférant évoquer à la place comme une organisation et des dirigeants « sans crédibilité ». Mais l’Association internationale de boxe (IBA) et son président, le Russe Umar Kremlev, se sont invités aux Jeux de Paris 2024, lundi 5 août. Leur présence a fait un certain bruit.
L’occasion : une conférence de presse annoncée la veille, censée présenter la version de l’IBA sur la polémique autour des boxeuses algérienne, Imane Khelif, et taïwanaise, Lin Yu-Ting. Le lieu : un salon tout en longueur au dernier étage d’un immeuble très parisien du 9ème arrondissement, à un jet de pierre des grands boulevards et du Musée Grévin. L’ambiance : surchauffée, à tous les sens du terme. Et parfois totalement surréaliste.
Soyons clairs : l’IBA n’a pas vraiment fait avancer le sujet. Et même pas du tout. Chris Roberts, le directeur exécutif, Ioannis Filippatos, le président de la confédération européenne de boxe, et Gabriele Martelli, le président de la commission des entraîneurs, se sont passés le micro pour « présenter les faits », selon l’expression du premier des trois hommes, ayant conduit l’IBA à exclure les deux boxeuses des derniers championnats du monde, l’an passé en Inde. Mais ils n’ont pas vraiment convaincu. Surtout, ils n’ont apporté aucun élément pouvant attester de la pertinence et la crédibilité des tests de féminité imposés aux deux athlètes.
Tout juste ont-ils détaillé la chronologie de l’affaire. Chris Roberts a expliqué que tout avait commencé en 2022, aux championnats du monde à Istanbul, où plusieurs boxeuses et entraîneurs ont demandé à l’IBA de tester les deux jeunes femmes. « Les résultats n’ont pas été concluants », a-t-il reconnu, avant de suggérer que l’enquête n’avait pas été poursuivie, le sujet étant « tout nouveau » pour l’instance. L’année suivante, une deuxième série de tests a été menée aux Mondiaux féminins en Inde, toujours à la demande des athlètes et de leur encadrement. Cette fois, les analyses ont été plus éloquentes. Imane Khelif et Lun Yu-Ting ont été exclues. « Nous en avons informé le CIO par courrier », a précisé Chris Roberts.
Rien de très nouveau, donc. Gênant. Mais la centaine de médias ayant quitté le périmètre olympique à l’heure du déjeuner n’ont pas tous regretté leur incursion dans un Paris de carte postale. Ils ont vécu un moment plein de surprises, très improbable, et très loin de l’ambiance feutrée et très cadrée des conférences de presse quotidiennes du CIO et du COJO Paris 2024 au Palais des Congrès.
Le timing, d’abord. L’IBA avait invité les médias à 13 h 00. A l’heure dite, un retard de 30 minutes a été annoncé. Puis un autre. En cause, un problème technique pour régler l’intervention à distance du président de l’AIBA, Umar Kremlev. Après une heure d’attente, le Russe a fini par apparaître à l’écran. Mais, mauvaise blague, le son n’a pas fonctionné. L’image sans les paroles.
Au deuxième essai, après un intermède assuré par Chris Roberts, Umar Kremlev a enfin pu s’exprimer. Il s’est lancé en russe dans un long monologue, où le propos est parti un peu dans tous les sens, mais sans jamais tourner autour du sujet du jour : la polémique sur les deux boxeuses à l’allure et au punch jugés trop masculins par certaines rivales.
Umar Kremlev a attaqué son intervention sans round d’observation, expliquant sur fond de tableaux religieux qu’il s’était senti « humilié en tant que chrétien par la cérémonie d’ouverture » des Jeux de Paris 2024. Puis il a enchainé avec son sujet favori, Thomas Bach et le CIO. « Ils ne défendent pas le sport et les athlètes, a assené le Russe. Pour Thomas Bach, cette affaire est une vengeance personnelle. Au CIO, si vous n’êtes pas d’accord, on vous élimine. »
Entre deux attaques contre l’instance olympique et son président, Umar Kremlev a suggéré qu’une telle polémique n’aurait pas eu lieu si l’IBA s’était occupée du tournoi de boxe des Jeux de Paris 2024. Puis il a embrayé sur un autre de ses sujets fétiches : l’argent. « Le CIO n’en verse pas aux athlètes aux Jeux olympiques, il préfère payer des hôtels de luxe à ses membre. Mais à l’IBA, nous avons de l’argent. Nous allons en distribuer aux médaillés, mais aussi aux boxeuses qui ont souffert de toute cette polémique. »
L’IBA a annoncé la semaine passée son intention d’attribuer une prime de 100.000 dollars à l’Italienne Angela Carini, au coeur de la controverse pour avoir abandonné après 46 secondes son combat contre l’Algérienne Imane Khelif (photo ci-dessus). Mais le président de la Fédération italienne de boxe a déjà fait savoir que personne, au sein de la délégation, n’accepterait cet argent.