Plus de doute possible : le CIO n’entend pas rester seulement un témoin passif dans la bataille entre l’IBA et World Boxing pour la gouvernance de la boxe olympique. L’instance a choisi son camp. Et elle le fait savoir.
Pour preuve ce courrier en date du 30 septembre envoyé par le CIO à tous ses comités nationaux olympiques. Signé par James McLeod, le directeur des relations avec les CNO et de la Solidarité olympique, Kit McConnell, le directeur des sports, Kit McConnell (NZL), et Mariam Mahdavi, la conseillère juridique, il appelle sans détour les comités nationaux olympiques à couper tous les liens avec les fédérations nationale de boxe encore affiliées à l’IBA.
« Les CNO ne doivent plus affilier ou entretenir des relations institutionnelles avec les fédérations nationales de boxe qui sont encore affiliées à l’IBA », explique le CIO dans son courrier.
Voilà pour le préambule. Il est clair. Il ne menace pas, mais se montre assez directif pour suggérer qu’il serait malvenu de penser ou agir autrement.
La suite reste dans le même ton. Le CIO rappelle dans son courrier que la boxe « ne figure pas au programme sportif des Jeux olympiques LA28. » Il explique que la seule voie pour inverser le processus serait de pouvoir s’appuyer sur une « fédération internationale partenaire pour la boxe d’ici le début de l’année 2025. » Et précise que cette fédération internationale a « récemment vu le jour, mais, en l’état actuel des choses, n’a pas encore été reconnue par le CIO. »
Enfin, le CIO prévient sans vraiment prendre de gants : « Il est donc d’ores et déjà clair que tout boxeur dont la fédération nationale adhère à l’IBA ne pourra pas participer aux Jeux olympiques LA28. Le CNO concerné devra exclure une telle fédération nationale de boxe de ses membres. »
Tout est dit. Visiblement fatigué de voir l’IBA le bombarder sans lassitude de critiques et d’accusations, le CIO se met en ordre de bataille. Il s’active pour favoriser la croissance de World Boxing, et dans le même temps la disparition de l’instance présidée par le Russe Umar Kremlev.
Sans surprise, l’IBA n’a pas retenu ses mots pour réagir au courrier du CIO. Dans un communiqué publié jeudi 3 octobre, elle évoque un « chantage sportif », qualifie la démarche de Lausanne de totalement « inacceptable », une « ingérence directe » dans l’agenda de ses membres. Et elle appelle ses fédérations nationales à « rester calmes et ne pas suivre les intentions du CIO qui veut nuire à la boxe. »
Dans son courrier, le CIO ne cite pas nommément World Boxing. Mais son message est assez clair pour être compris et entendu. Lausanne ne s’adresse pas non plus directement au monde de la boxe. Il emprunte une voie détournée, les comités nationaux olympiques, ses représentants au niveau national. Mais il est tout aussi clair que la pression est désormais sur les fédérations nationales de boxe. Il leur faut faire un choix. Et le faire vite.
En restant fidèles à l’IBA, dont les largesses financières leur permettent de continuer à exister dans un contexte économique souvent difficile, elles risquent de voir le comité national olympique leur tourner le dos. Une situation intenable. En rejoignant World Boxing, elles restent dans les clous du mouvement olympique, mais sans garantie de pouvoir boucler leur budget.
La Fédération française de boxe, toujours dans le camp de l’IBA, a déjà fait savoir que la question serait discutée lors du prochain comité directeur. « Le CIO a tout verrouillé. Alors soit on prend de nouvelles orientations, soit on meurt », a confié à l’Equipe son président, Dominique Nato.
Que feront les autres ? Un congrès extraordinaire de la Confédération asiatique de boxe est convoqué pour le 23 novembre à Bangkok. Avec un seul ordre du jour : rester à l’IBA ou rejoindre World Boxing. La question sera soumise au vote des pays membres. Un premier scrutin, organisé par l’instance le 31 août en Arabie saoudite, avait accouché d’un résultat en faveur de l’IBA. Avec une telle pression du CIO, il serait étonnant que la décision des pays asiatiques reste la même.
World Boxing compte actuellement 44 fédérations nationales. Encore trop peu pour espérer une reconnaissance du CIO. Mais l’instance olympique lui tend les bras. Et elle ne ménage pas ses efforts pour lui déblayer le terrain.