Le monde de l'escrime

La lame de fond

— Publié le 21 novembre 2024

L’universalité ne se décrète pas. Mais elle se mesure. Aux Jeux olympiques de Paris 2024, les compétitions d’escrime au Grand Palais, sublime décor pour un rendez-vous de l’élite mondiale, ont enregistré une participation plus planétaire que jamais. Pas moins de cinq pays – Cap Vert, Kenya, Chypre, Niger et Rwanda – ont été représentés pour la première fois de l’histoire.

La raison ? Elle est à chercher dans la politique de développement à long terme mise en place par la Fédération internationale d’escrime (FIE) depuis plus d’une décennie. Une stratégie orientée vers plusieurs directions, dont la participation et les résultats des Jeux de Paris 2024, où les médailles ont été réparties entre 13 pays issus de quatre continents, ont été la plus récente et visible illustration.

Première cible : le haut niveau. L’époque où l’escrime mondiale tenait presque toute entière dans une poignée de pays, européens pour l’essentiel, est révolue depuis longtemps. L’élite se prépare désormais un peu partout sur la planète. Dieter Lammer, le directeur sportif et technique de la FIE, l’explique : « Chaque année, la FIE profite des championnats du monde, cadets/juniors et seniors, pour organiser un camp d’entraînement d’une semaine, avant le début des compétitions, dans la ville-hôte de l’événement. Il rassemble une vingtaine d’escrimeurs et est encadré, dans les trois armes du programme, par des entraîneurs de la FIE. »

Preuve de la réussite du programme : la présence aux Jeux de Paris 2024 d’un fleurettiste des Iles Vierges, Kruz Schembri, passé par un camp d’entraînement de la FIE à l’occasion des championnats du monde juniors 2023.

Nouveauté de la nouvelle saison, la première de l’olympiade menant aux Jeux de Los Angeles 2028 : un calendrier international repensé et revu par le comité exécutif pour favoriser le développement de l’escrime au niveau mondial. Depuis le mois de septembre dernier, les quatre zones continentales – Afrique, Amériques, Asie-Océanie et Europe – proposent un nombre égal de compétitions internationales. La saison est ainsi découpée sur le plan géographique en quatre parts égales, pour les juniors comme les seniors.

« Cette nouvelle configuration du calendrier permet de réduire les coûts de voyage, surtout pour les plus petits pays qui n’ont pas toujours les moyens d’envoyer leurs meilleurs escrimeurs un peu partout dans le monde, explique Dieter Lammer. Cette première saison est un essai. Le principe sera analysé, adapté et mis en place durablement. »

Autre axe de développement : la formation. La FIE soutient depuis plusieurs années un vaste programme de formation des entraîneurs et maîtres d’armes à l’échelle mondiale. Elle s’appuie sur les confédérations pour développer, sous la houlette de ses propres coaches, les compétences de cadres techniques partout sur la planète.

En parallèle, les deux académies de la FIE assurent un solide programme de formation d’entraîneurs dans les trois armes de l’escrime. La plus universelle est installée à Budapest, en Hongrie, où les techniciens viennent du monde entier pour suivre un cursus de deux à trois mois. A Johannesburg, en Afrique du Sud, l’académie de la FIE est plus dirigée vers les pays africains anglophones, avec un cursus de 11 mois. Depuis leur création, les deux structures ont formé ou accompagné un grand nombre d’entraîneurs, dont beaucoup enseignent dans leur propre pays à tous les niveaux de pratique.

L’instance internationale le sait : le développement de l’escrime ne peut pas ignorer la question des équipements. Depuis plus d’une décennie, elle soutient un programme spécifique, l’aide au matériel, dédiée aux fédérations nationales. « Nous donnons tous les ans du matériel – armes, équipement personnel des tireurs, appareils de signalisations, pistes… – à 25 pays par zone continentale, explique Dieter Lammer. Les demandes transitent par les confédérations. Nous aidons ainsi annuellement environ 100 fédérations, soit les deux tiers de nos fédérations membres. »

Dernière piste de développement, plus récemment explorée mais déjà très prometteuse : les vétérans. A compter de la prochaine édition, prévue à l’automne 2025, les championnats du monde vétérans proposeront une nouvelle catégorie d’âge, 40/49 ans, la plus jeune du programme. Il ne sera donc plus exigé d’afficher au moins 50 ans pour se frotter à la concurrence internationale. Avantage : combler l’écart entre la fin d’une carrière chez les seniors et le début d’une nouvelle aventure dans les rangs des vétérans.