— Publié le 4 décembre 2024

Le CIO ne connait pas la crise mais refuse les primes

Institutions Focus

Pas le plus mauvais moyen de se mettre en jambes et d’afficher un beau sourire : la commission exécutive a ouvert sa réunion de trois jours, mardi 3 décembre à Lausanne, en parlant chiffres. Les siens. Les chiffres de ses recettes pour la dernière olympiade. Le genre de chiffres à donner le tournis, même en Suisse.

Au dernier décompte, présenté à la commission exécutive par le président de la commission des finances, le Singapourien Ser Miang NG, le CIO va redistribuer la somme record de 6,8 milliards de dollars pour le dernier cycle olympique, entre 2021 et 2024. Et cela, a insisté son porte-parole en conférence de presse, Mark Adams, malgré une forte inflation et une situation économique tendue pour un grand nombre d’acteurs du mouvement.

Cette somme représente une hausse de 12 % par rapport à l’olympiade précédente, et un bond de 45 % par rapport au cycle 2009-2012.

Avec un tel résultat, le CIO a pu redistribuer la somme également record, et sans doute encore plus éloquente, de 4,7 millions de dollars par jour au cours de la même période.

Le miracle ? Il est connu : les contrats de marketing mondiaux signés avec les membres du programme TOP, et les droits de télévision des Jeux. Mark Adams l’a rappelé : pas moins de 90 % de ces revenus sont distribués aux fédérations internationales, aux comités nationaux et aux organisateurs des Jeux, le reste (10 %) étant utilisé pour faire fonctionner le CIO.

Tout va bien, donc. Et même mieux que cela. L’avenir ? Aucun souci. Trois partenaires mondiaux, les Japonais Toyota, Panasonic et Bridgestone, quitteront le navire à la fin de l’année, préférant dépenser différemment leur budget sport. Mais Mark Adams l’a annoncé : le CIO a « sécurisé des revenus commerciaux pour un montant total de 13,5 milliards de dollars » pour les prochaines olympiades, dont 7,3 milliards jusqu’aux Jeux de Los Angeles 2028.

Trois partenaires mondiaux s’en vont, aucun nouveau n’est encore arrivé, mais les revenus augmentent encore. Pas vraiment très logique sur un plan purement comptable. Mais Mark Adams le certifie sans l’ombre d’une hésitation : « La marque olympique est plus forte que jamais ». Cool.

Autre chiffre débattu mardi 3 décembre par la commission exécutive, mais avec des mines moins réjouies : la prime de 50.000 dollars promise par World Athletics à tous les champions olympiques en athlétisme aux Jeux de Paris 2024. Un pactole, le premier de l’histoire, que l’instance internationale a le projet d’étendre à tous les médaillés lors des Jeux de Los Angeles 2028.

A l’annonce de cette initiative de World Athletics, avril dernier, le CIO avait toussé, mais sans la condamner trop fermement. Depuis, Lausanne a durci le ton. « Il y a eu un large accord sur le sujet, je dirais même une unanimité, a expliqué Mark Adams mardi en conférence de presse. C’est une question de principe, d’efficacité et de distribution au sein du mouvement olympique. Les athlètes sont engagés par leurs comités nationaux olympiques. Ce sont eux qui les préparent, il leur revient de les récompenser. Cela se fait depuis de nombreuses décennies. »

Le porte-parole du CIO a étalé ses chiffres, pour mieux développer l’argumentation de la commission exécutive sur la question des primes. « Comme vous le savez, 91 comités nationaux olympiques ont remporté des médailles aux Jeux de Paris 2024. Si tous les médaillés – athlètes et équipes de tous les sports – étaient récompensés, ce serait environ 1.000 athlètes et équipes qui en bénéficieraient. Mais 65 % des médaillés individuels et des équipes médaillées proviennent des 15 CNO en tête du classement des médailles, des CNO bien financés et privilégiés ».

Ajouter à leurs primes du CNO une autre prime versée par la fédération internationale de leur sport ne ferait qu’accroître les inégalités déjà existantes, a insisté Mark Adams.

Le britannique l’a reconnu : la question a été l’objet d’un débat au sein de la commission exécutive. Il en est sorti un consensus pour rejeter l’initiative de World Athletics, avec une insistance particulière de la part des représentants des fédérations internationales et de la présidente de la commission des athlètes, la Finlandaise Emma Terho. Sebastian Coe est prévenu : leurs voix lors du vote pour la succession de Thomas Bach ne lui seront pas acquises.