— Publié le 13 décembre 2024

Pour Morinari Watanabe, le CIO doit tout revoir

Institutions Focus

Qui succèdera à Thomas Bach à la présidence du CIO ? A un peu plus de trois mois du vote de la session, prévu en mars prochain en Grèce (18 au 21), la réponse reste aussi incertaine qu’au moment de l’annonce des sept candidats. Elle pourrait bien le rester jusqu’au jour du scrutin, malgré l’exercice périlleux de la présentation des postulants, le 30 janvier à Lausanne, un grand oral de 15 minutes où chacun sera invité à dévoiler son programme et exposer sa vision.

Une chose est sûre : le vent du changement ne soufflera pas forcément de là où il est le plus attendu. Certes, Sebastian Coe a démontré à Word Athletics, depuis sa prise de pouvoir en août 2015, qu’il n’était jamais en retard d’une idée ou d’une initiative pour modifier le décor. Mais ses récentes déclarations le suggèrent : Morinari Watanabe ne craint pas lui non plus de secouer le cocotier.

Le Japonais, président de la Fédération internationale de gymnastique (FIG) depuis 2017, récemment réélu pour un nouveau mandat, promet même de tout revoir dans deux des secteurs majeurs du CIO : le marketing et la gouvernance. Il l’a expliqué cette semaine dans une interview accordée à Reuters : la stratégie marketing actuelle n’est plus adaptée, et le pouvoir de la commission exécutive nettement surdimensionné.

Le marketing, d’abord. Morinari Watanabe l’a noté, comme le reste du mouvement olympique, mais sans doute avec un peu plus d’attention : les partenaires japonais du CIO au sein du programme mondial TOP, Toyota, Bridgestone et Panasonic, vont quitter le navire à la fin de l’année.

Pour le président de la FIG, leur départ à la même date ne doit rien au hasard. Il est l’illustration d’un décalage entre la somme investie et le retour obtenu. Très élevée d’un côté, modéré de l’autre. Les partenaires payent cher, et même très cher, mais sans la moindre visibilité sur les sites de compétition.

« De nombreuses entreprises japonaises souhaitent parrainer les Jeux olympiques, elles veulent apporter leur soutien, mais elles ont bien sûr besoin de valeur ajoutée, a expliqué Morinari Watanabe. Jusqu’à présent, l’équilibre n’est pas bon. Beaucoup d’argent est versé, mais le partenaire n’en tire pas les bénéfices. C’est un problème. Si je présidais une grande entreprise, je proposerais plutôt de regarder vers le football, car il autorise la publicité ».

Le Japonais insiste : le moment est venu pour le CIO, avec la perspective d’un nouveau président à la fin du mois de juin prochain, de changer son approche. « Le système de marketing actuel, où il est demandé 200 ou 300 millions pour utiliser seulement les anneaux, ne peut pas continuer », explique-t-il.

Les faits lui donnent raison, mais les chiffres le contredisent. Certes, les trois partenaires mondiaux du CIO au Japon ont pris la décision de dépenser leur argent ailleurs. Et l’instance n’a toujours pas annoncé l’arrivée d’un nouveau grand nom au sein du programme TOP, malgré la rumeur de la signature à venir d’un sponsor indien. Mais Lausanne a récemment déclaré avoir sécurisé des revenus commerciaux à hauteur de 13,5 milliards de dollars pour les deux prochaines olympiades.

Autre changement souhaité par Morinari Watanabe : la gouvernance. Le sujet est glissant, mais le Japonais s’y risque. Il ne craint pas de dire tout haut ce que beaucoup, dans le mouvement olympique, murmurent seulement en coulisses : la commission exécutive est devenue trop puissante. Elle décide de tout, laissant seulement aux autres membres le maigre privilège de valider en session des décisions déjà prises.

« Beaucoup de gens veulent être impliqués dans les décisions du CIO, car nous sommes une grande famille sportive. Mais la commission exécutive est trop forte, a confié le Japonais à Reuters. Beaucoup de choses sont décidées uniquement par les membres de la commission ou par le président. Ce n’est pas très bon. Le CIO doit respecter les fédérations internationales et les comités nationaux olympiques. Aujourd’hui, il est devenu trop fort. Les CNO et les FI doivent être plus proches les uns des autres, car aujourd’hui, c’est un peu comme si on leur donnait des instructions ».

Un candidat à la présidence qui propose de réduire le pouvoir de la fonction à laquelle il aspire, voilà une démarche peu fréquente. Mais elle pourrait bien lui faire gagner quelques alliés.