Plus de doute possible : la campagne pour la présidence du CIO est bien lancée. Et elle affiche déjà une belle vitesse. Les sept candidats à la succession de Thomas Bach ont mis la dernière main à leur programme – ils doivent être publiés par l’instance avant la fin de la semaine -, et ils préparent leur grand oral devant les membres, le 30 janvier à Lausanne.
En attendant, ils s’expriment dans les médias. Sebastian Coe et Morinari Watanabe, notamment, l’ont fait récemment. Feisal Al Hussein s’est plié, lui aussi, à l’exercice de l’interview. Il en a moins l’habitude. Le prince jordanien, âgé de 61 ans, membre de la commission exécutive du CIO, a répondu aux questions de Reuters lors d’un passage à Londres.
Son manifeste de candidat repose sur trois piliers : l’imagination, l’intégrité et l’inclusion. Jusque-là, rien de très nouveau. Mais le Jordanien va plus loin : il propose, comme le Japonais Morinari Watanabe, de repenser la gouvernance du CIO pour la rendre plus démocratique. Plus étonnant, et même novateur : il suggère de rendre les dates des Jeux plus flexibles, pour tenir vraiment compte des changements climatiques.
Le CIO, d’abord. Feisal Al Hussein le reconnait : l’instance a besoin de redonner plus de voix et d’influence à ses membres. Le pouvoir ne peut pas appartenir seulement au président et à la commission exécutive.
« Nous n’utilisons pas pleinement le potentiel du CIO, a-t-il confié à Reuters. La question est de savoir comment nous pouvons libérer ce potentiel. Un élément clé de cette démarche est l’inclusivité. Elle consiste à mieux intégrer les membres, à s’assurer que leur voix est entendue, à leur donner le sentiment qu’ils font partie intégrante du processus. Il est important qu’ils n’aient pas l’impression que les décisions sont dictées de haut en bas, mais plutôt que leur point de vue compte et qu’ils peuvent y contribuer activement. »
En clair, Feisal Al Hussein propose d’en finir avec l’époque, les années Thomas Bach, où les membres du CIO se contentent le plus souvent de valider en session les décisions déjà prises à Lausanne. Ils ne votent plus, ils entérinent.
Autre projet : des Jeux olympiques aux dates plus flexibles. Les Jeux d’hiver, pour relever le défi du réchauffement climatique, mais aussi ceux d’été.
« L’Olympisme repose sur l’universalité, c’est-à-dire que les Jeux peuvent être organisés dans différents endroits dans le monde, explique-t-il. Ce qui me préoccupe aujourd’hui, c’est qu’avec le réchauffement de la planète ou le changement climatique, il y aura de moins en moins de pays qui pourront accueillir les Jeux Olympiques en toute sécurité aux dates traditionnelles. Le format actuel limite le nombre de pays qui peuvent les organiser. Je discuterais avec les fédérations internationales, et avec les autres acteurs du mouvement olympique, pour évoquer une possible flexibilité dans le calendrier afin de permettre à d’autres pays d’accueillir les Jeux. »
Le prince jordanien ne les cite pas, mais son idée pourrait favoriser le ambitions des deux superpuissances sportives du Golfe, le Qatar et l’Arabie saoudite. Avec des Jeux d’été sortis de leur fenêtre habituelle, entre juillet et septembre, leurs chances de décrocher leur organisation en 2036 ou au-delà seraient nettement renforcées.
Frère cadet du roi Abdallah II, au pouvoir en Jordanie depuis un quart de siècle, Feisal Al Hussein se présente comme un candidat consensuel et crédible, capable de rassembler les cultures et les courants.
« Culturellement, je suis oriental, mais j’ai aussi été éduqué à l’occidentale, je comprends donc la différence de culture, souligne-t-il. Cela m’a aidé dans une grande partie du travail que nous faisons, en étant capable de combler les fossés (…) J’espère que la plupart des membres regarderont le manifeste et se diront : « Ok, c’est quelqu’un que je peux voir comme président du CIO et j’aime ce qu’il pense. J’aime son style ». Je crois que j’ai toujours été crédible parce que je parle très franchement. Je n’essaie pas de dire des choses que je pense que les gens veulent entendre. »