— Publié le 24 février 2025

« L’Afrique doit être le continent d’aujourd’hui, pas celui de demain »

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La 11e édition de la Convention internationale du sport en Afrique (CISA) s’est achevée vendredi 21 février à Dakar. Soixante-treize intervenants se sont succédés pendant trois jours pour échanger sur le développement du sport africain. Un rendez-vous d’autant plus symbolique que le continent accueillera pour la première fois les Jeux olympiques de la Jeunesse l’an prochain, là encore à Dakar. Diamil Faye, président du comité d’organisation, dresse le bilan de l’événement.


Quel bilan vous dressez de cette 11e édition ?

Le bilan est positif. Notre objectif était de relancer la convention après quelques années d’arrêt. Être en mesure de réunir autant de panélistes de qualité et avoir des partenaires comme l’ACNOA à nos côtés, c’est quelque chose d’extraordinaire. Nous avons réussi à ramener Yékini, légende de la lutte sénégalaise, qui est venu parler sur notre plateau alors qu’il ne faisait aucune sortie depuis des années. C’est formidable ! En sachant que l’équipe organisatrice a largement été renouvelée, on est reparti avec des jeunes Sénégalais, dont 90 % ne connaissaient pas l’événement. On peut être heureux de cette réussite. On a fini en beauté, avec une salle pleine.

Vous êtes satisfait de la qualité des échanges ?

S’il y a un point qui fait l’unanimité, c’est la qualité des échanges et des présentations des experts. C’est une grande satisfaction. On a même eu du mal à arrêter certains échanges, on a fini à 19 heures au lieu de 17 heures vendredi ! Ça veut dire que les gens ont soif d’apprendre, d’échanger. Ça colle avec notre objectif, qui est de contribuer au développement des capacités des acteurs du sport en Afrique. En plus des conférences, d’une zone d’exposition et de networking, des intronisations au panthéon de la gloire et des trophées pour reconnaître le travail de certains acteurs du sport, nous avons mis en place une zone sportive. Des jeunes des écoles et des civils ont pu découvrir la boxe thaïlandaise ou le hockey sur gazon et s’initier à de nouveaux sports. La convention s’est terminée par une session sur la prochaine génération, où on a donné la parole aux jeunes, pour qu’ils partagent leur vision de ce que le sport doit être en Afrique. Nous sommes fiers de donner l’opportunité aux jeunes d’apprendre et se développer.

Cette édition confirme que la CISA a toujours un rôle à jouer ?

Effectivement, au fil des jours, on a vu l’intérêt grandir. Ça nous encourage. Pour la première fois, nous avons été en direct sur une chaîne de télévision locale qui diffuse sur le satellite. On a touché beaucoup plus de personnes que celles qui étaient dans la salle. Ce sont des signes encourageants sur lesquels nous allons continuer à travailler pour que cette plateforme reste une référence.

La CISA lance aussi une séquence importante pour le sport africain et pour Dakar avec la perspective des Jeux olympiques de la Jeunesse 2026 ?

Tout à fait. On a eu un très bon panel sur les JOJ, sur l’héritage que devraient laisser ces Jeux. Je retiens une volonté de contribuer au développement local, d’avoir une offre qui serait valable pour tous les jeunes en matière d’infrastructures, en matière de développement des capacités. On espère que le temps permettra de réaliser tout ça. Dakar 2026 doit être un moment de célébration pour la jeunesse sénégalaise, mais plus globalement pour la jeunesse africaine.

Vous avez mis en avant des thèmes comme l’eSport ou l’intelligence artificielle. C’était important de montrer que l’Afrique s’engage sur ces sujets d’avenir ?

Oui, c’est essentiel. Au Sénégal, le nombre personnes affiliées à l’eSport est relativement faible comparé à beaucoup d’autres pays. Le Prince Feisal d’Arabie saoudite disait que son pays compte 24 millions de joueurs sur une trentaine de millions de personnes. Ça montre le chemin qu’on a à faire. C’était important aussi que les gens comprennent comment marche l’eSport marche. Leandro Larrosa, du CIO, et Jacques Sagna (président de la Fédération sénégalaise des sports électroniques) en ont parlé. On a organisé un atelier pour bien comprendre comment fonctionne l’eSport, comment le gérer, et je pense que c’est important. C’est la même chose sur l’intelligence artificielle. On a essayé de parler des possibilités d’utiliser cette technologie au profit des athlètes et du mouvement sportif.

Lors des Jeux de Paris 2024, vous avez déclaré que le continent africain n’avait pas encore réalisé que le sport est un outil de développement. Le but de la CISA est aussi de participer à cette prise de conscience ?

Tout à fait. Le président de l’AIMS, qui s’occupe de la reconnaissance de nouvelles fédérations, a pu expliquer pas mal de choses sur la gouvernance du sport. Les gens ont posé beaucoup de questions, ils ne maîtrisaient pas ce fonctionnement. On a aussi eu une présentation de la Solidarité olympique. Les enjeux ne sont pas encore bien compris, surtout au niveau politique. Il est important que les politiques de tout bord comprennent ces enjeux pour proposer des solutions et faire du sport une industrie. Il faut travailler pour que l’Afrique devienne une référence en matière de sport. Il y a des signaux encourageants, mais je suis fatigué d’entendre que l’Afrique est le continent de demain. Je n’ai pas envie que ce soit le continent de demain, je veux que ce soit celui d’aujourd’hui ! Il faut que l’on commence à travailler dès maintenant, avec des standards internationaux, pour élever le niveau.

La Convention reviendra-t-elle en 2026 ?

C’est notre volonté. Notre priorité est déjà d’évaluer, de voir les points d’amélioration, pour faire encore mieux en 2026, au Sénégal ou ailleurs. L’idéal pour nous est de pouvoir aller toucher d’autres pays. Deux pays nous ont approchés de manière sérieuse, d’autres ont exprimé un intérêt, en Afrique du nord et en Afrique de l’ouest. Nous allons continuer les discussions.