— Publié le 13 mars 2025

Thomas Bach : « Nous nous sommes reconnectés avec la Gen Z » 

Institutions Focus

C’est avec le sourire que Thomas Bach s’est présenté devant la presse internationale en visio-conférence mercredi après-midi. Le président du CIO a accordé une heure de son temps aux médias, débordant même de quelques minutes, pour prolonger ce moment d’échange, l’un de ses derniers dans sa fonction. L’occasion de revenir sur ses douze ans de mandat et sur les défis qui attendent son successeur avant l’élection du 20 mars.

Croissance, crédibilité et audience

Thomas Bach a décidé de ne pas briguer de nouveau mandat « il y a longtemps, pour des raisons de bonne gouvernance », car « une nouvelle époque nécessite de nouveaux leaders ». Le président sortant a désigné la cérémonie de clôture des Jeux de Paris comme le meilleur moment de ses douze années à la tête du CIO. « Nous avons adopté l’Agenda olympique en 2014 et là, nous avons vu les Jeux que nous avions imaginés », savoure-t-il. « Des Jeux sobres, avec la créativité, la culture et la joie de vivre française », qui ont rassemblé 206 CNO. De quoi terminer sa présidence en beauté, laissant à son successeur un CIO renforcé.

« Les chiffres parlent d’eux-mêmes, confie-t-il au sujet du programme TOP. Vous voyez de nouveaux sponsors arriver. Nous avons discuté avec eux des façons dont nous pouvons leur donner plus de reconnaissance. Nous sommes à 7,7 milliards assurés pour cette olympiade, nous avons garanti 7,4 milliards pour la prochaine et 6,5 milliards pour 2029-2032. Malgré la situation économique difficile et les incertitudes, on peut s’attendre à une croissance. Peu d’organisations internationales peuvent aujourd’hui parler de croissance. La plupart seraient plus qu’heureuses en restant stables. »

Même satisfaction quant à l’évolution du processus d’attribution des hôtes des Jeux olympiques et paralympiques, un point essentiel pour « la crédibilité du CIO et du mouvement olympique » selon Bach : « À chaque élection, il y avait des allégations de corruption, de favoritisme. Les lobbyistes étaient à la manœuvre dans les hôtels, ce n’était pas sain. Le résultat était que nous n’avions plus de candidats : la réputation de la procédure était tellement mauvaise que personne ne voulait s’exposer. Nous avons révolutionné ces procédures et nous avons vu qu’il n’y a plus aucune allégation, tout est carré. Beaucoup d’organisations sportives suivent la même procédure de dialogue et elles semblent aussi trouver que cela fonctionne. (…) Il y a des procès liés à l’attribution de plusieurs éditions des Jeux avant la mise en place de l’Agenda olympique. Cela dit tout. »

Thomas Bach se félicite aussi d’avoir connecté le mouvement olympique à la Gen Z, notamment grâce aux sports urbains (breaking, skateboard, basket 3×3, etc.) : « Nous nous sommes reconnectés avec la jeunesse. Au début du siècle, avant mon élection, nous avions dans beaucoup de grands pays une audience moyenne de 60 ou 65 ans. Vous pouviez calculer facilement le moment où nous aurions disparu. Il y avait un clair besoin de changer, de regarder ce qui intéresse la jeune génération et de le prendre en compte. C’est ce que nous avons fait et je pense que nous pouvons être plus que satisfaits du résultat. Nous avons renoué avec la Gen Z, à la fois sur le terrain et en dehors. » Conséquence : environ cinq milliards de personnes ont suivi les Jeux de Paris, soit 84% de l’audience mondiale potentielle de l’événement. Un record.

Ne pas revenir « au temps des boycotts »

Les membres du CIO voteront dans une semaine pour désigner David Lappartient, Sebastian Coe, Johan Eliasch, Kirsty Coventry, le Prince Feisal, Juan Antonio Samaranch Jr ou Morinari Watanabe comme le prochain président de l’instance. Face aux critiques portant sur le manque d’ouverture de l’élection, Thomas Bach a rétorqué que ce cadre, défini par la commission d’éthique, vise à « protéger l’intégrité » de la procédure. « Ce sont les mêmes que quand j’ai été élu en 2013. Ce que je vois, c’est que cela semble fonctionner en termes d’intégrité et c’est le plus important. Ce n’est pas une élection publique », rappelle l’Allemand.

Il a distillé plusieurs conseils à son successeur : « se concentrer sur les athlètes », qui doivent « rester au cœur du mouvement olympique », et « garder l’unité du mouvement ». Comment ? En respectant deux principes, en premier lieu la solidarité. « Il faut être solidaire, reconnaître que certains ont de meilleures conditions, d’autres de moins bonnes. Notre rôle est de prendre ces différences en considération et d’essayer de donner à tous les athlètes du monde les meilleures conditions possibles. » Deuxième principe pour garantir l’unité : la neutralité politique. « Ce sera extrêmement important dans les prochaines années, avertit Bach. On voit un nouvel ordre mondial se former, nous devons y être préparés. Le monde est multipolaire. Un bloc pourrait essayer de tirer le mouvement olympique et les Jeux dans son camp. Si nous autorisons ça, nous reviendrons au temps des boycotts et nous contribuerons aux divisions. »

Et de conclure avec un message d’ordre général : « Nous avons 206 CNO, des dizaines de fédérations internationales, des dizaines de milliers d’athlètes, beaucoup de parties prenantes… Il y a beaucoup de sujets, il y en aura toujours. Nous avons fait de gros progrès, dans beaucoup de domaines, mais il y aura toujours des affaires en cours au sein du mouvement olympique. Il y a beaucoup à faire, donc je souhaite le meilleur à mon successeur. » Il ou elle en aura bien besoin.