Paris 2024 n’a pas fait pas exception : aux Jeux olympiques et paralympiques, l’action ne se limite pas aux seuls terrains de compétition. En coulisses, l’événement est également marqué par une intense activité politique et diplomatique.
En sa qualité de pays-hôte, la France en a profité à fond. Son ambassadeur pour le Sport, Samuel Ducroquet, l’a expliqué à FrancsJeux.
FrancsJeux : Les Jeux de Paris 2024 ont-ils été, comme attendu et espéré, une formidable opportunité d’expression pour la diplomatie sportive française ?
Samuel Ducroquet : Absolument. Ils ont été, de notre point de vue, une très grande réussite. Par leur succès, d’abord, car il a contribué à faire rayonner la France par le sport, ce qui constitue l’un des fondements de notre activité et notre diplomatie sportive. L’objectif a été atteint. Les commentaires de nos partenaires à l’international ont été très élogieux, tant sur l’organisation que sur la partie sportive ou sur l’engouement autour de ces Jeux. Un deuxième marqueur est le nombre très important de hauts dignitaires étrangers venus en France pour les Jeux. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont été une centaine à se rendre à Paris la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, et plus une centaine de ministres des Sports a fait le déplacement à cette occasion. Au total, près de 500 missions de dignitaires internationaux ont été répertoriées en France dans le cadre des Jeux. Enfin, autre temps fort diplomatique, les Jeux ont permis de faire passer des messages forts et de faire avancer des dossiers prioritaires, en particulier à l’occasion du Sommet consacré au Sport pour le Développement durable, organisé le 25 juillet au Carrousel du Louvre. Il a réuni, autour de Thomas Bach et Emmanuel Macron, plus de 500 invités, dont une cinquantaine de chefs d’Etat, des athlètes, des officiels et des représentants de la société civile.
Que s’est-il passé en coulisses, d’un pont de vue diplomatique ?
Il en est toujours ainsi, à Paris comme ailleurs : les Jeux favorisent les échanges et les rencontres bilatérales. Paris 2024 n’a pas fait exception, au contraire. Emmanuel Macron a reçu à l’Elysée les chefs d’Etat avant la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques (photo ci-dessus), puis encore avant celle des Jeux paralympiques. Même chose pour Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques, qui a accueilli ses homologues. Il faut aussi souligner tout le travail mené, également en coulisses, par la diplomatie pour faire en sorte que tout fonctionne. La mobilisation, notamment, des 170 agents de liaison du Quai d’Orsay qui ont accompagné individuellement chaque souverain, chef d’Etat ou de gouvernement pendant les Jeux.
Les Jeux de Paris 2024 ont été l’occasion pour la France de signer des accords avec des pays étrangers ?
Oui. Ils ont surtout été le cadre de nombreuses initiatives concrètes. Au Sommet sur le Sport pour le Développement durable, la NBA a annoncé la construction de 1000 terrains de basket. La FIFA l’a imitée avec l’annonce d’un plan de 1000 terrains de football. Et le CIO a fait savoir qu’il augmenterait de 10 % les fonds dédiés à la Solidarité olympique. La Fédération française de judo a profité des Jeux pour signer un accord de coopération avec les Emirats arabes unis. Et pas moins de 17 nouvelles organisations du mouvement sportif ont rejoint à Paris, pendant les Jeux, l’accord cadre « Sport for Nature » des Nations unies.
Les Jeux de Paris 2024 ont été les premiers en été, depuis Montréal 1976, organisés dans l’espace francophone. Ont-ils permis de redonner au français une meilleure place dans le mouvement olympique ?
Nous étions très attendus sur ce sujet car il est évident que, sans la vigilance des pays francophones et de l’OIF, la langue française aurait perdu sa place au sein du mouvement olympique. L’usage du français aux Jeux de Paris 2024 a été favorisé en amont des Jeux, notamment par la délégation ministérielle à la Francophonie du ministère des Sports, et par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, qui a par multiplié les formations, préparé des guides, des livrets d’accueil pour aider les visiteurs étrangers à réussir leur séjour. Beaucoup de démarches ont été entreprises. Pendant les Jeux, les acteurs de la francophonie ont organisé plusieurs événements : l’AFCNO (Association francophone de comités nationaux olympiques) s’est réunie au Club France, une soirée francophone s’est déroulée à la Maison du Canada… Plusieurs fédérations nationales de pays francophones se sont rapprochées. Et on constate aujourd’hui que le mouvement paralympique, où le français n’est pas langue officielle, s’empare également du sujet.
Quelles seront les prochaines étapes de la diplomatie sportive française ?
La première étape va consister à valoriser à l’international tout ce qui a été entrepris et réalisé à l’occasion des Jeux. La France a démontré un vrai savoir-faire dans l’événementiel sportif. Il va intéresser les futurs hôtes. Il faut le mettre en avant et je m’y attèlerai en tant qu’ambassadeur pour le Sport. J’en veux pour preuve des rendez-vous la semaine passée avec le ministre des Sports égyptien, ou la secrétaire générale du ministère indien des Sports, dans la perspective de la candidature de l’Inde aux Jeux d’été en 2036. Il faut aussi valoriser les entreprises françaises qui ont été impliquées dans l’organisation des Jeux de Paris 2024. Enfin, nous allons faire en sorte que le sport continue d’être un outil pour renforcer les liens avec nos pays partenaires. Je pense au Sénégal dans la perspective des Jeux olympiques de la Jeunesse en 2026, mais aussi la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Kenya…
A titre plus personnel, comment avez-vous vécu ces Jeux à domicile avec la casquette d’ambassadeur français pour le sport ?
J’ai été ravi d’avoir pu exercer cette fonction dans ce contexte unique. L’opportunité a été exceptionnelle. Concrètement, mon action a été assez diversifiée. Avant les Jeux, il était surtout question de veiller à la bonne coordination des services impliqués dans la « livraison » des Jeux au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Après le début des Jeux, je n’ai cessé d’aller à la rencontre du mouvement sportif, sur le terrain. J’ai rencontré les représentants de 35 délégations étrangères pendant les Jeux, dont la Grande-Bretagne, le Brésil, la Suisse, le Japon, puis une douzaine à l’occasion des paralympiques. A cela, il faut ajouter les nombreuses rencontres bilatérales pour discuter des possibilités de coopération, avec notamment les Etats-Unis, le Kenya, l’Inde ou le Bahreïn. Enfin, les Jeux nous ont aussi permis d’organiser le premier forum international de la diplomatie sportive, auquel ont participé l’Australie, le Royaume-Uni, les Etats-Unis ou encore la Nouvelle-Zélande. Un forum qui aura vocation à se réunir à nouveau dans les mois qui viennent.