Quintuple champion olympique d’aviron, entre 1984 et 2000, Sir Steve Redgrave n’a pas seulement joué les commentateurs de sa discipline aux derniers Jeux à Londres. Il a en été tout à la fois un ambassadeur, l’un des derniers porteurs de la flamme, et un observateur attentif de l’équipe britannique et de sa préparation. FrancsJeux l’a rencontré à Rio de Janeiro, à l’occasion des Trophées Laureus 2013. Interview.
FrancsJeux : Les Jeux de Londres ont été salués un peu partout comme une totale réussite. Et vous, qu’en avez-vous pensé ?
Steve Redgrave : Je suis d’accord avec l’opinion générale. Les Jeux de Pékin avaient été fantastiques. Les Chinois avaient su profiter de l’évènement pour envoyer un formidable message. Tout le monde s’était alors demandé comment nous allions nous en sortir pour ne pas subir la comparaison. Si nous avions cherché à copier les Jeux de 2008, nous aurions peut-être pu réussir dans le meilleur des cas les deuxièmes Jeux les plus beaux de l’histoire. Mais nous avons compris qu’il nous fallait tracer notre propre voie. A l’arrivée, le public a été au rendez-vous, la fête magnifique, les compétitions d’un très haut niveau. En prime, ces Jeux ont apporté une immense fierté aux Britanniques, car ils ont passé sans doute au moins deux tiers du temps passé devant la télévision à voir leurs propres athlètes décrocher des médailles.
Pour le sport britannique, il y aura un avant et un après Londres 2012 ?
Oui. Mais les leçons et les images des Jeux de Londres vont s’effacer peu à peu, pour laisser la place à celles de Rio 2016.
Quel a été l’impact le plus fort des Jeux de Londres sur le sport de haut niveau en Grande-Bretagne ?
J’ai été très surpris de la réussite de nos équipes aux Jeux de Londres. A Atlanta, en 1996, la Grande-Bretagne avait obtenu une seule médaille d’or. Jusque là, nous en ramenions souvent cinq, un résultat qui était alors jugé acceptable. Nous sommes passés à onze en 2000, puis neuf en 2004. Dans les deux cas, la conséquence d’une politique sportive mieux organisée, soutenue par des moyens financiers plus importants alloués aux différentes disciplines. A Pékin, nous étions censés nous situer encore à mi-chemin de notre programme axé sur Londres 2012, mais nous avons crevé le plafond en décrochant 19 titres olympiques. A l’époque, je me souviens m’être dit que nous ne ferions peut-être pas mieux à domicile. Mais nous avons finalement battu tous les records avec 29 médailles d’or.
Aujourd’hui, diriez-vous que le sport d’élite britannique se porte mieux que jamais ?
Oui. Les résultats des Jeux de Londres ne resteront pas sans lendemain. Le succès appelle le succès. Certes, les subventions ont été réduites, mais ces coupes budgétaires ne touchent pas, ou très peu, les sports où nous nous révélons les plus performants, comme le cyclisme, l’aviron ou l’athlétisme. Les subventions accordées au handball, par exemple, ont été largement diminuées, voire supprimées. Mais quelle importance ? Nous n’aurions jamais été capables de décrocher une médaille olympique en handball…
A Rio, en 2016, l’équipe britannique peut-elle encore surfer sur la vague des Jeux de Londres ?
Je crois, oui. Le programme mis en place pour les Jeux de Londres aura encore des effets positifs en 2016. Nous pouvons y être aussi performants que l’an passé à domicile. J’anticipe un bilan collectif de 20 à 29 médailles d’or. Mais je suis moins optimiste pour la suite. En 2020, la chute pourrait être assez brutale.