Sepp Blatter s’en remettra-t-il? Cette fois, il est permis d’en douter. La FIFA, sa chose depuis 1998 et sa première élection à la présidence, traverse une nouvelle crise. Le énième épisode d’un feuilleton à l’odeur de souffre débuté quatre années en arrière. Le détonateur est américain. Son nom: Michael J Garcia. Surnom: l’incorruptible. En charge de l’enquête sur des soupçons de corruption lors de l’attribution des Mondiaux 2018 à la Russie et 2022 au Qatar, il a démissionné mercredi en dénonçant des manques de transparence et d’envie de faire la lumière.
Michael J Garcia n’a pas fait dans la nuance pour annoncer publiquement sa démission. Il a publié un communiqué via le cabinet d’avocats américain dont il est employé. Un texte où il ne ménage personne. « Pendant les deux premières années après mon recrutement en juillet 2012 comme président indépendant de la chambre d’enquête de la commission d’éthique de la FIFA, je pensais que cette instance faisait de réels progrès, écrit l’ancien procureur fédéral. Ces derniers mois, cela a changé. J’ai identifié des problèmes, sérieux et de grande envergure, dans le processus de candidature et de sélection des Mondiaux 2018 et 2022. Une transparence insuffisante ne sert pas les intérêts de la FIFA. Aucune commission de gouvernance indépendante, aucun enquêteur, ne peuvent changer la culture d’une organisation. »
Michael J Garcia dénonce également, en le nommant, Claudio Sulser, le président du corps disciplinaire de la FIFA. Il lui reproche de ne pas l’avoir suivi lorsqu’il a demandé une publication de son rapport. Surtout, il l’accuse de n’avoir rien fait pour le défendre lorsque le comité exécutif de la FIFA a voulu le traduire devant la commission de discipline pour avoir enfreint les règles d’éthique par ses prises de position publique sur une meilleure transparence.
La démission de Michael J Garcia intervient, troublant timing, au moment où le comité exécutif de la FIFA se réunit, aujourd’hui et vendredi, à Marrakech en marge de la Coupe du Monde des clubs. L’Américain n’y sera pas présent, mais son nom sera sur toutes les lèvres. Depuis hier, sa décision de claquer la porte n’a laissé personne indifférent. Sepp Blatter a réagi via un communiqué, s’avouant « surpris », ce dont on peut raisonnablement douter. Jérôme Champagne, son seul rival à ce jour dans la course à la présidence de la FIFA (les élections auront lieu en mai prochain), a estimé que cette démission constituait « un pas en arrière. »
Michel Platini, lui aussi, s’est fendu d’un communiqué pour ne pas rester silencieux sur l’affaire. « La commission d’éthique de la FIFA avait été créée pour améliorer la transparence de cette instance, ce que nous voulions, mais à la fin cela a causé davantage de confusion. La démission de M. Garcia est un nouvel échec pour a FIFA », a écrit le président de l’UEFA. Dans un tel climat, le Français aurait sans doute eu des chances sérieuses de bousculer Sepp Blatter et s’emparer de la FIFA. Seul ennui, mais de taille: il n’est pas candidat.