Bernard Lapasset, le président de la World Rugby, peut se frotter les mains. La Coupe du Monde 2015, disputée actuellement en Angleterre et au Pays de Galles, est en train de faire basculer son sport dans une nouvelle dimension. Elle installe solidement l’événement au troisième rang dans la hiérarchie internationale, juste derrière les Jeux olympiques et la Coupe du Monde de football.
Débuté le 18 septembre par un match d’ouverture entre l’Angleterre et les Fidji à Twickenham, le Mondial 2015 en est toujours à la phase de poules. Mais il a déjà battu tous les records. Aux guichets, notamment. Improbable résultat, la rencontre entre l’Irlande et la Roumanie, dimanche dernier à Wembley, a établi un nouveau record d’affluence, avec 89.267 spectateurs. Sur le papier, l’opposition entre les deux équipes n’avait pourtant pas l’allure d’un sommet de la compétition.
Avant même sa grande finale, prévue le 31 octobre, la Coupe du Monde a déjà généré près de 300 millions d’euros en recettes de billetterie. Les droits de télévision crèvent eux aussi le plafond. Ils dépasseraient les 200 millions d’euros. Une somme encore loin de celle que le CIO encaisse pour les Jeux olympiques, mais très respectable dans un sport longtemps montré du doigt pour son caractère seulement régional.
Trois mois avant le coup d’envoi du tournoi planétaire, la World Rugby estimait que les revenus de l’édition 2015 approcheraient sans doute les 700 millions d’euros. Un résultat en hausse de 70% par rapport au Mondial 2007, organisé en France, présenté jusque-là comme le plus profitable de l’histoire. Au train où vont les choses, Brett Gosper et Alan Gilpin, respectivement directeur exécutif et directeur de la Coupe du Monde à la World Rugby (ex IRB), pourront relever leurs ambitions de plusieurs crans.
A en croire une étude réalisée avant le début de compétition par la société Repucom, l’intérêt pour le rugby et son événement majeur serait de plus en plus fort dans les pays non traditionnels du rugby. En Italie, par exemple, il serait en hausse de plus de 10%. En Asie, il connaîtrait actuellement une poussée historique. La victoire du Japon sur l’Afrique du Sud, lors du premier week-end du tournoi, a enregistré dans la région de Tokyo une audience comparable à celles des rencontres majeures de l’équipe nationale de football.
A la World Rugby, cette réjouissante volée de chiffres ne donne pas seulement de belles couleurs à la direction et aux officiels. Elle fait surtout le bonheur du trésorier. La réussite économique de la Coupe du Monde 2015 devrait, en effet, remplir les caisses de la Fédération internationale. A la différence de l’univers olympique, où le CIO distribue une partie des recettes des Jeux à la ville organisatrice (1,5 milliards d’euros pour les JO d’été en 2024), la World Rugby ne partage pas ses revenus issus du sponsoring.
Surtout, il est exigé du pays organisateur qu’il casse sa tirelire pour obtenir le droit d’accueillir le tournoi planétaire. Pour l’édition 2015, l’Angleterre et le Pays de Galles auraient déboursé environ 75 millions d’euros. Dans quatre ans, le Japon devra se fendre d’un chèque de 130 millions d’euros à l’ordre de la World Rugby pour recevoir le Mondial 2019. Autre sport, autres mœurs.