L’année olympique commence de façon curieuse à Rio de Janeiro. Le stade Nilton Santos (notre photo), où doivent se dérouler les épreuves d’athlétisme en août 2016, est privé d’eau et d’électricité depuis plusieurs jours. En cause, des factures impayées par le club résident, Botafogo. Ses dettes auprès des fournisseurs atteindraient environ 200.000 euros. Mais le club en question, locataire de l’enceinte depuis près de 10 ans, avance pour sa défense qu’il n’a jamais été remboursé par les autorités de l’état des sommes engagées pour l’entretien et la maintenance des équipements.
Le problème devrait être réglé très rapidement. Ses conséquences seront minimes. Et l’incident très vite renvoyé dans les oubliettes de l’Histoire. Mais l’affaire du stade Nilton Santos est révélatrice d’un problème de fond des Jeux de Rio en 2016: l’écart abyssal qui s’est creusé entre la situation économique du Brésil à l’époque où le CIO a accordé l’événement olympique, et celle que traverse aujourd’hui le pays.
En octobre 2009, lorsque le nom de Rio de Janeiro a été prononcé par Jacques Rogge au moment de dévoiler la ville-hôte des JO de 2016, le Brésil vivait une forme d’euphorie économique. Le pays pointait en tête des nations dites émergentes », avec une classe moyenne en pleine croissance et une balance commerciale excédentaire.
Un peu moins de sept ans plus tard, la crise frappe tous les secteurs de l’économie. En 2009, le PIB brésilien affichait une croissance de l’ordre de 8%. L’an passé, il a accusé un recul proche de 3%. En 2015, les exportations brésiliennes ont atteint leur niveau le plus bas depuis six ans. Elles se situent aujourd’hui à un niveau très inférieur à celui de l’époque où le président Lula portait fièrement le dossier de Rio 2016.
Début 2010, le déficit budgétaire du pays dépassait à peine les 2% de son PIB. Aujourd’hui, il approche dangereusement la ligne des 10%. En 2010, moins de 10% des Brésiliens exprimaient une opinion défavorable de la façon dont le président en activité, Lula, dirigeait le Brésil. Aujourd’hui, ils sont plus de 60% à critiquer dans les sondages la politique menée par Dilma Rousseff. Entre fin 2009 et début 2016, la valeur du réal, la devise brésilienne, a été divisée par trois par rapport au dollar américain.
A sept mois presque jour pour jour du début des Jeux olympiques, le Brésil affiche un état de forme très éloigné de celui de l’époque où le CIO lui avait accordé les premiers JO de l’histoire sur le continent sud-américain. Les athlètes, entraîneurs et officiels en subiront les conséquences en août prochain. Saisis à la gorge, les organisateurs ont réduit tous les budgets, avec des coupes allant de 5 à plus de 20% selon les secteurs. Les épreuves pré-olympiques seront allégées, la cérémonie d’ouverture moins coûteuse que prévue, les chambres du village des athlètes ne seront pas équipées de postes de télévision.
Au-delà de l’horizon 2016, le cas brésilien pourrait avoir un effet sur les futures candidatures. Selon un membre du CIO, s’exprimant sous couvert d’anonymat, l’institution olympique pourrait désormais y réfléchir à deux fois avant d’accorder sa confiance à une ville et un pays présentant un risque économique. « La sécurité pourrait bien primer », suggère-t-il. Reste à savoir laquelle des candidates, entre Budapest, Los Angeles, Paris et Rome, présentera les meilleures garanties de stabilité économique et financière au moment du vote pour la ville-hôte des Jeux de 2024, le 13 septembre 2017 à Lima.