Ses initiales seront bientôt mieux connues que son propre nom. Papa Massata Diack, alias PMD (notre photo), fils de l’ancien président de l’IAAF, Lamine Diack, pourrait bien se révéler être l’un des personnages les plus sulfureux du sport mondial. Un acteur clef dans une série d’affaires de corruption qui embarrasse tout à la fois la Fédération internationale d’athlétisme et le CIO.
Passons rapidement sur les relations entre PMD et l’IAAF. Elles sont connues depuis plusieurs semaines. Employé comme consultant en marketing par l’instance mondiale de l’athlétisme jusqu’en décembre 2014, à l’époque où son propre père en assurait la présidence, le Sénégalais en a été radié à vie. Il est soupçonné de corruption. Il aurait notamment joué un rôle majeur dans les tentatives d’extorsion de fonds auprès des athlètes russes reconnus coupables de dopage.
L’affaire n’est pas nouvelle. Mais le quotidien Le Monde apporte des éléments inédits dans un long article publié dans son édition du 12 janvier 2016. Il révèle notamment que Papa Massata Diack, 50 ans, troisième des quinze enfants de Lamine Diack (avec deux épouses…) aurait « dépensé 131 400 euros, les 16 et 25 juillet 2013, auprès de l’enseigne Elysées Shopping à Paris, pour acheter des montres et des articles de luxe ». L’une de ces montres aurait été donnée à Gabriel Dollé, l’ancien patron de la lutte antidopage à l’IAAF. Le même Gabriel Dollé aurait expliqué aux enquêteurs, toujours selon Le Monde, avoir également reçu 50 000 euros en espèces à l’Hôtel Fairmont de Monaco, en échange de son silence sur des cas positifs d’athlètes russes.
Papa Massata Diack se trouve actuellement au Sénégal, loin des poursuites de la justice française. Son avocat, Me Jean-Yves Garaud, n’a pas souhaité répondre aux questions du quotidien.
Sombre hasard des faits: le nom du fils de Lamine Diack revient dans une autre affaire, relayée par The Guardian. Une affaire de corruption qui met en scène son père et, cette fois, six membres présumés du CIO. Le quotidien anglais rapporte avoir eu accès à des emails envoyés par PMD à un homme d’affaires qatari en mai 2008. A l’époque, Doha était ville requérante à l’organisation des Jeux d’été en 2016. Cette correspondance électronique suggère que six personnes, identifiées seulement par leurs initiales qui correspondent à six membres du CIO de l’époque, exigeaient de recevoir leur « colis » par un conseiller spécial à Monaco. Un conseiller spécial que le Guardian a identifié comme étant Lamine Diack en personne.
Les colis en question ont-ils tous été envoyés? A qui? Mystère. Mais cette présumée tentative de corruption n’a pas, semble-t-il, été couronnée de succès. Un mois après l’envoi des emails, Doha a été écartée par le CIO de la course aux Jeux de 2026. La capitale du Qatar n’a pas été retenue dans la « short-list » des villes candidates.
Il n’empêche, le CIO prend la chose très au sérieux. L’organisation olympique a demandé au Guardian de lui fournir une copie des emails envoyés par PMD. Le quotidien a refusé, sans surprise, invoquant à juste titre la protection des sources. Dans un communiqué adressé à Associated Press, le CIO explique avoir cherché à obtenir des informations auprès du quotidien anglais en vue de les transmettre à sa commission d’éthique. « Mais cela nous a été refusé, précise le CIO. En l’absence d’éléments concrets, il nous est difficile de commenter un tel dossier. »
Affaire classée? Pour le CIO, certainement. Au moins provisoirement. Mais les noms de ses six mystérieux membres destinataires de ces non moins mystérieux colis pourraient bien sortir au grand jour, pour peu que la justice française mette la main sur Papa Massata Diack.