Pas facile de porter un nom russe, ces temps-ci, dans le mouvement sportif international. Le pays est montré du doigt pour ses pratiques dopantes, sa fédération d’athlétisme est toujours suspendue, sa participation aux Jeux de Rio reste très incertaine. Mais l’un de ses dirigeants, au moins, observe l’avenir avec un regard impatient et un étroit sourire au coin des lèvres. Oleg Matytsin (notre photo, avec Thomas Bach), 52 ans en fin de semaine prochaine, préside la Fédération internationale du sport universitaire (FISU) depuis le mois de novembre 2015. Deux petits trimestres, trois fois rien, mais un laps de temps suffisant à cet ancien étudiant en éducation physique pour lancer le train de la révolution.
Le Russe l’a expliqué à FrancsJeux à l’occasion de la dernière Convention SportAccord, en avril à Lausanne: « J’ai une vision à 10 ans de l’évolution de la FISU et du sport universitaire. Nous sommes en train de poser les premiers jalons d’un plan très ambitieux. Les choses vont beaucoup bouger au cours des prochaines années. »
Le changement sera déjà géographique. La FISU a posé à la mi-avril la première pierre de son futur siège, un vaste bâtiment très symboliquement installé sur le campus de l’université de Lausanne. Elle ne quittera pas le canton de Vaud, mais gagnera en surface. Le signe d’une volonté de grandir. L’organisation a également attiré dans ses filets un poisson aux mensurations pharaoniques, la société Norilsk Nickel, premier producteur mondial de nickel et de palladium, principal producteur d’or en Russie. Un géant de l’économie russe, devenu partenaire officiel de la FISU.
Mais le vrai changement s’annonce dans l’organisation de ses compétitions. Oleg Matytsin et son secrétaire général, le Belge Eric Saintrond, l’ont expliqué pendant SportAccord: les quelques 34 championnats du monde organisés par la FISU s’apprêtent à connaître une révolution. « Nous souhaitons que les athlètes étudiants y participent au sein de l’équipe de leur université, et non plus sous les couleurs de leur sélection nationale, racontent les deux hommes. Une telle évolution permettrait de mieux valoriser tout à la fois nos compétitions et les universités concernées. Elle contribuerait également à aider ces établissements universitaires dans leur promotion du sport et de ses valeurs. »
Le concept fonctionne déjà dans les championnats européens. Il sera étendu cette année aux compétitions en Asie et en Amérique. L’idée sera discutée et débattue à l’occasion du Forum de la FISU, prévu en juillet 2016 à Montpellier. Avec un objectif: installer ce nouveau format de championnats du monde par universités à partir de l’année 2018. Eric Saintrond explique: « Aujourd’hui, 3000 universités sont représentées aux Universiades d’été, et environ 800 à celles d’hiver. De nos jours, les étudiants bougent, ils voyagent. Le format que nous proposons permettrait de constituer des équipes mélangeant plusieurs nationalités. »
Autre changement: l’âge limite pour participer aux épreuves estampillées FISU a été abaissé de 28 à 25 ans. Les compétiteurs devront désormais avouer entre 17 et 25 ans pour en pousser la porte. « Nous pouvons ainsi en faire une sorte d’antichambre des Jeux olympiques », suggère Eric Saintrond. Selon Oleg Matytsin, l’idée aurait été très bien accueillie au CIO, par Thomas Bach en particulier. Le président allemand se dit très concerné par le sujet, pour avoir participé à deux reprises aux Universiades au temps de sa carrière d’escrimeur.
L’avenir du sport universitaire est en marche. Il fera étape à Naples, en passe d’être officiellement désignée ville-hôte des Universiades d’été en 2019. La FISU y fêterait le 60ème anniversaire d’un événement dont la première édition s’était déroulée, déjà, sur le sol italien.