Pas facile, la vie de sportif russe de haut niveau. A 16 jours de l’ouverture des Jeux de Rio 2016, il ne leur est toujours pas possible de savoir s’ils passeront le mois d’août au Brésil, à poursuivre leur rêve olympique, ou sur une plage ensoleillée à tuer le temps en attendant des jours meilleurs, ou encore à broyer du noir derrière les rideaux baissés de leur résidence de Moscou ou d’ailleurs. A 16 jours de l’ouverture des Jeux de Rio 2016, un rapport piloté par le juriste canadien Richard McLaren a enfoncé un peu plus leur pays dans la crise, dénonçant preuves à l’appui un dopage d’état « dirigé, contrôlé et supervisé » par le ministère du Sport russe, avec l’aide des services secrets. Mais, à 16 jours de l’ouverture des Jeux de Rio 2016, le CIO n’a toujours pas pris de décision définitive quant à la participation d’une délégation russe, complète ou embryonnaire, aux prochaines épreuves olympiques.
Que sait-on vraiment, aujourd’hui, de la situation de la Russie et de son avenir olympique? A la fois beaucoup et pas grand-chose. Une somme de faits et un torrent de questions. Un immense point d’interrogation. Les certitudes, d’abord.
- Le CIO a décidé… de ne pas encore décider. Sa commission exécutive a tenu en urgence, mardi 19 juillet, une réunion téléphonique pour statuer sur la question russe au lendemain de la publication du rapport McLaren. Il était légitime d’en attendre une décision. Elle a été repoussée et interviendra « d’ici 7 jours », a indiqué le CIO dans un communiqué publié ce mercredi. Dans l’intervalle, le CIO a nommé une commission disciplinaire, une de plus. Elle est dirigée par le Français Guy Canivet, vice-président de la commission d’éthique du CIO et ancien membre de la Cour constitutionnelle française, et compte parmi ses membres Robin Mitchell, le vice-président de la commission médicale et scientifique du CIO, Yang Yang, la représentante des athlètes à la commission d’éthique du CIO, Andrew Ryan, le directeur exécutif de l’ASOIF, et Wolfgang Schobersberger, le représentant des Fédérations Internationales des sports d’hiver, membre de la commission médicale de la FIS.
- Le CIO n’organisera ni n’accordera « son patronage à aucune rencontre ou événement sportifs en Russie ». En premier lieu, au projet de Jeux Européens 2019, prévus à Sotchi et Kazan. Une deuxième édition de l’événement continental dont l’avenir semble de plus en plus compromis. Le CIO n’accordera « aucune accréditation aux officiels du Ministère russe des Sports » ou à toute personne citée dans le rapport McLaren. En tête de liste, Vitaly Mutko, le ministre russe des Sports, dont la présence au Brésil tient aujourd’hui de la fiction. Le CIO demande à toutes « les Fédérations internationales de sports olympiques d’hiver de geler leurs préparatifs pour les grands événements en Russie, tels que les Championnats du monde, les Coupes du monde ou d’autres grandes compétitions internationales sous leur responsabilité, et de rechercher activement d’autres organisateurs. ». Le CIO demande à toutes « les Fédérations internationales de mener une enquête approfondie et, en cas d’implication dans une infraction au Code mondial antidopage, à la FI correspondante, de prendre des sanctions contre les fédérations nationales russes ».
- La Russie annonce avoir immédiatement sanctionné les personnes impliquées et citées dans le rapport McLaren. Mais Vitaly Mutko aurait conservé son bureau ministériel, selon les dernières infos parvenues du Kremlin.
- Une audition a été organisée au Tribunal arbitral du spotrt (TAS), mardi 19 juillet à Lausanne, sur le recours déposé par 68 athlètes russes contre la décision de l’IAAF de suspendre leur fédération. Yelena Isinbayeva y a défendu la cause de ses partenaires de l’équipe nationale. Seb Coe était dans l’assistance.
Les questions, maintenant. Nombreuses, urgentes et, pour la plupart, encore enveloppées d’un flou opaque.
- La Russie sera-t-elle présente aux Jeux de Rio? Question à plusieurs millions de dollars. Le CIO est censé trancher avant la fin de la semaine prochaine. Reste à savoir s’il choisira la méthode dure, une exclusion de la délégation toute entière, ou s’il optera pour du cas par cas. Dans cette deuxième hypothèse, il pourrait confier le dossier aux fédérations internationales. Un scénario qui pourrait s’avérer confus, et même créer une joyeuse pagaille. Au lendemain de la publication du rapport McLaren, l’ASOIF (Association des fédérations olympiques des sports d’été) a fait savoir qu’elle était hostile à une exclusion en bloc de la Russie, privilégiant plutôt une « justice individuelle ». Bruno Grandi, le président de la Fédération internationale de gymnastique (FIG), un sport non cité dans le rapport McLaren, a martelé que le droit de participer aux Jeux ne pouvait pas « être retiré à un athlète ayant obtenu sa qualification et n’ayant jamais été accusé de dopage ». Son homologue de la Fédération internationale de lutte (28 cas de trucage cités dans le rapport MacLaren), Nenad Lalovic, a assuré qu’il suivrait « la décision du CIO ».
- Les athlètes russes présents à Rio porteront-ils les couleurs de la Russie ou seront-ils inscrits comme participants neutres? Au CIO de trancher. Là aussi, mystère.
- Vladimir Putin se rendra-t-il à la cérémonie d’ouverture des Jeux de Rio 2016? Avec le président russe, tout est permis. S’il venait au stade Maracana, vendredi 5 août, il volerait la vedette à tout le monde.