Les choses vont vite pour Yelena Isinbayeva. Très vite. Peut-être trop. Le mois dernier, la recordwoman du monde du saut à la perche a annoncé depuis Rio de Janeiro la fin de sa carrière sportive. Elle rêvait de boucler la boucle sur un nouveau titre olympique. La décision de l’IAAF d’exclure la fédération russe l’en a empêchée. « Bien sûr je suis en colère de ne pas être là comme compétitrice, mais j’ai besoin d’être là. Je ne serai jamais d’accord avec le fait qu’ils m’ont exclue, je ne le pardonnerai jamais, avait-elle déclaré à l’agence TASS à peine posé un pied sur le sol brésilien. Que puis-je dire à celle qui sera championne? Elle sera deuxième par défaut. »
Depuis, l’athlète russe s’est offert une forme de consolation, et un soupçon de revanche sur l’establishment, en intégrant le CIO. Candidate pour un siège à la commission des athlètes, avec 22 autres postulants, elle a été élue aux Jeux de Rio en compagnie de l’escrimeuse allemande Britta Heidemann, le pongiste sud-coréen Seug-min Ryu et le nageur hongrois Daniel Gyurta. Elle siégera au cours des huit prochaines années au sein de l’organisation olympique. Ironie de l’histoire: Sebastian Coe, le président de l’IAAF, attend toujours à la porte qu’on lui fasse signe d’entrer.
La nouvelle carrière de l’ex perchiste ne devrait pas s’arrêter à cette première casquette. Sauf peu probable détour de l’histoire, Yelena Isinbayeva devrait être élue à la présidence de la Fédération russe d’athlétisme. A 34 ans. Sans la moindre expérience de dirigeant derrière elle.
Aleksandr Parkin, le directeur exécutif de la Fédération, l’a expliqué aux médias russes: « A l’exception de Yelena Isinbayeva, je n’ai enregistré aucune autre candidature à ce jour. Elle est aujourd’hui seule en course. » Les listes sont ouvertes depuis plusieurs semaines. Elles le resteront jusqu’au soir du 9 octobre 2016. Passé cette date, il ne sera plus possible de soumettre une nouvelle candidature.
Dmitriy Shlyakhtin, le président par intérim, appelé à occuper la fonction au début du scandale du dopage dans l’athlétisme russe, a fait savoir qu’il ne briguait pas la présidence. Svetlana Masterkova, la double championne olympique de demi-fond, actuellement présidente de la Fédération de Moscou, avait laissé entendre qu’elle tenterait sa chance. Elle est revenue sur sa position et confirmé qu’elle ne serait pas candidate.
A l’évidence, la présence de la recordwoman du monde du saut à la perche sur la ligne de départ semble décourager les postulants. Beaucoup se disent que sa notoriété, ses relations étroites avec le pouvoir politique et la force de ses convictions laissent peu de place à une quelconque rivalité. L’ex athlète Maksim Karamashev l’a clairement exprimé à l’agence TASS: « Ma candidature ne sera pas proposée pour le rôle de président. Je pense que, dans l’état actuel de l’athlétisme russe, le poste doit être occupé par une personnalité mondialement connue ou par un manager de grande expérience. Si Yelena Isinbayeva est candidate, alors je ne vois aucune raison de me présenter face à elle. » Maksim Karamashev avait pourtant annoncé l’an passé qu’il briguerait la présidence de la Fédération russe lors des élections à l’automne 2016.
Membre du CIO et bientôt patronne de l’athlétisme russe, Yelena Isinbayeva marche sur les traces d’un autre perchiste de renommée mondiale: Sergueï Bubka. Pas forcément le plus mauvais exemple à suivre.
