Au train où vont les choses, il faudra sans doute attendre les premières épreuves pour parler de sport et des athlètes aux Jeux de PyeongChang 2018. A 37 jours de l’ouverture, l’actualité olympique reste dominée par la politique. Avec un feuilleton nord-coréen aux rebondissements nombreux mais à l’issue incertaine.
Au lendemain d’un discours de Kim Jong-un, le numéro un du régime de Pyongyang, favorable à une participation aux Jeux, une date a été annoncée par Séoul pour entamer les discussions. Selon le ministre de l’Unification, Cho Myoung-gyon, les deux voisins pourraient se retrouver autour d’une table dès mardi 9 janvier 2018, dans le village frontalier de Panmunjom. Cool. Historique, surtout, les deux Corée ayant officiellement rompu le dialogue depuis février 2016.
Tout roule, donc? Pas si vite. A Washington, l’annonce d’une possible participation de la Corée du Nord aux Jeux de PyeongChang, même réduite à une poignée de fondeurs et patineurs, en a fait tousser certains. En tête de cortège, Lindsey Graham (photo ci-dessus), le sénateur républicain de Caroline du Sud. « Autoriser la Corée du Nord de Kim Jong-un à participer aux Jeux d’hiver reviendrait à légitimer le régime le moins légitime de la planète, a-t-il twitté lundi 1er janvier, quelques heures après les vœux télévisés du leader nord-coréen. Je suis confiant dans la décision de la Corée du Sud de rejeter cette offre absurde, et j’ai l’intime conviction que si la Corée du Nord se rend au Jeux, nous n’irons pas. »
Difficile de se montrer plus direct. Lindsey Graham agite sans nuance la menace du boycott. Il laisse entendre que les Jeux de PyeongChang pourraient se dérouler sans l’équipe américaine, dans l’hypothèse où les discussions entre les deux voisins de la péninsule coréenne aboutissent au cours des prochaines semaines.
La réaction américaine ne constitue pas, en soi, une grande surprise. Mais elle est à prendre au sérieux. Lindsey Graham n’est pas le premier sénateur venu. Selon plusieurs médias américains, il pourrait très bientôt figurer en première position sur la liste des possibles successeurs de Donald Trump à la Maison Blanche dans l’éventualité, toujours d’actualité, où l’enquête sur ses liens avec la Russie envoie l’actuel président aller jouer ailleurs.
La menace est donc réelle, mais elle isole encore plus les Etats-Unis. Partout ailleurs, le geste d’ouverture de Kim Jong-un a été accueilli avec un franc enthousiasme. Le CIO s’en est félicité, assurant par la voix de son porte-parole, Mark Adams, qu’il participerait de façon étroite aux discussions avec le comité d’organisation des Jeux de PyeongChang, le gouvernement sud-coréen et le comité olympique de Corée du Nord.
Même son de cloche à Pékin. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Geng Shuang, a expliqué mardi 2 janvier que le rapprochement entre les deux Corée était « une bonne chose ». Il a suggéré que la participation du Nord aux Jeux d’hiver 2018 constituait un signe positif. Enfin, il a confié que le régime Pékin soutenait les deux voisins dans leurs efforts pour améliorer leurs relations et réaliser la dénucléarisation de la péninsule.
En Corée du Sud, le maire de la province de Gangwon, hôte des Jeux d’hiver, ne craint pas d’aller plus vite que la musique. Choi Moon-soon propose déjà que les deux Corée forment un couple « mixte » en patinage artistique pour l’épreuve olympique. Le politicien sud-coréen aurait rencontré des officiels de Corée du Nord lors d’une réunion à huis clos, le mois dernier en Chine, à l’occasion d’un tournoi de football de jeunes.
Au cours de la discussion, Choi Moon-soon aurait proposé à ses interlocuteurs d’envoyer un bateau dans le port de Wonsan, afin de transporter vers PyeongChang les athlètes, entraîneurs et officiels de la délégation nord-coréenne. Le maire de la province de Gangwon suggère désormais de marquer le rapprochement entre les deux pays par la participation d’un couple formé de patineurs des deux Corée. Une belle idée.