Début d’année bien remplie pour Tony Estanguet. Le président des Jeux de Paris 2024 a bouclé deux visites à PyeongChang, en février pour les Jeux olympiques, le mois suivant pour l’événement paralympique. Dans l’intervalle, il a dirigé son premier conseil d’administration du COJO, au cours duquel a été discutée et validée sa rémunération. Costaud. Mais il a pris le temps de répondre longuement aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux: Comment envisagez-vous votre rôle de président du comité d’organisation des Jeux de Paris 2024?
Tony Estanguet: Je souhaite lui donner une dimension inédite. Je le conçois de façon très exécutive, en étant totalement investi. Le travail sera collectif, mais il me reviendra de prendre les décisions, tant pour le recrutement des équipes que pour la gestion des parties prenantes. J’ai disputé quatre éditions des Jeux d’été, je suis membre du CIO depuis six ans. Je veux apporter mon expérience et ma connaissance des attentes des uns et des autres. Nous avons tout ce qu’il faut pour réussir des Jeux incroyables, mais il faudra pour cela nous montrer très ambitieux. Je veux être le président qui saura fédérer ces ambitions.
Aurez-vous des domaines d’intervention privilégiés?
Aujourd’hui, je veux garder l’oeil sur tous les sujets. Mais je prendrai de la distance au fur et à mesure que nous avancerons. Mes deux séjours à PyeongChang ont été intéressants pour découvrir les coulisses de l’événement. Il est important que je connaisse tout cela, même si ce n’est pas là-dessus que nous ferons la différence. Je vais me concentrer progressivement sur tout ce qui fera des Jeux de Paris 2024 une réussite, en allant au-delà du seul secteur opérationnel.
Il se dit que vous souhaitez vous impliquer de façon très directe et personnelle sur le dossier des sports additionnels…
C’est exact. Il s’agit de l’un de mes dossiers prioritaires, j’ai l’intention de le suivre de très près car il contribue à la vision des Jeux. Je ne veux pas prendre le moindre retard sur la carte définitive des sites, avant de m’attaquer à la question des sports additionnels. Les deux sujets sont étroitement liés. La carte doit être prête en juin prochain. A mes yeux, le programme des Jeux constitue un élément clé pour les audiences et l’engagement du public.
Depuis la session de Lima en septembre dernier, quelles relations entretenez-vous avec les pouvoirs publics?
Nous continuons à travailler ensemble. L’envie de réussir ne s’est pas arrêtée à la victoire lors de la session de Lima. Pour les Jeux de Londres, les acteurs publics n’étaient pas représentés au conseil d’administration du comité d’organisation. Le CIO ne nous imposait pas de le faire, mais nous avons tenu à tous les intégrer. Cette présence va demander un plus gros travail d’alignement, mais je serai le trait d’union entre les autorités et le mouvement sportif.
La question du coût des Jeux revient comme un refrain dès qu’il est question d’évoquer le sujet Paris 2024. Comment comptez-vous travailler au cours des six prochaines années avec cette épée de Damoclès?
Je ne vais pas nier cette question. Elle constitue un vrai sujet. Nous avons face à nous un double défi: tenir le budget tout en conservant nos ambitions. Cela va être compliqué. Il faudra être créatif, savoir surprendre. Il va me revenir de faire mieux avec moins.
Cette obsession de la maîtrise des coûts ne risque-t-elle pas de constituer un frein à vos ambitions?
Elle est dans l’air du temps, il est normal que nous y soyons confrontés. Nous avons en France un rapport à l’argent compliqué, ce n’est pas nouveau. Je ne vais pas le changer. Mais à moi de résister pour organiser des Jeux hors normes. Je vais me battre pour pousser tous les acteurs du dispositif à voir plus grand et plus haut.
Comment réagissez-vous face à la mise en place d’un tel arsenal de contrôles, alors que le comité d’organisation est financé pour une part infime par des fonds publics?
L’inquiétude est légitime, je la comprends. On nous impose des standards très rigoureux, nous les acceptons. A nous d’être transparents et rassurants. Heureusement, nous avons la chance de pouvoir compter sur des acteurs privés pour lancer la machine, en premier lieu le CIO dont la contribution va s’élever à 1,7 milliard de dollars (1,37 M€ au cours actuel).
Cette pression sur les coûts, notamment en termes de rémunérations, ne risque-t-elle pas réduire vos ambitions dans le recrutement des équipes?
Le risque existe. Mais je ne suis pas inquiet. Le projet intéresse tellement que nous aurons les bonnes personnes aux bons endroits. Nous recevons tous les jours des CV de candidats d’un très haut niveau. Les gens veulent en être, quitte à gagner moins d’argent que dans leur position actuelle.