Le sport français aurait-il enfin appris toutes les nuances du mot lobbying? Probable. Ces derniers mois, ses représentants sont parvenus à inverser la spirale de l’échec qui l’entraînait vers le bas sitôt qu’il était question de postuler à l’accueil d’un événement majeur du calendrier mondial. Désormais, la victoire se pointe à chaque tentative. Bluffant.
Jeudi 17 mai, le conseil de la Fédération internationale de ski (FIS) devait choisir pour l’attribution des Mondiaux de ski alpin en 2023 entre un dossier français, articulé autour des riches stations savoyardes de Courchevel et Méribel, et une candidature autrichienne, portée par Saalbach, non moins riche haut-lieu des sports d’hiver, situé dans le land de Salzbourg. Un match France/Autriche. Un affrontement de colosses.
Preuve de son nouveau savoir-faire dans la maîtrise d’une campagne, la France a raflé la mise. Par 9 voix contre 6, la FIS a opté pour l’option savoyarde. Pour la cinquième fois de l’histoire, la France organisera les championnats du monde de ski alpin, après Chamonix en 1937 et 1962, Grenoble en 1968 (dans le cadre des Jeux d’hiver), et enfin Val d’Isère en 2009.
La série continue. Après les Jeux de Paris 2024 et la Coupe du Monde de rugby en 2023, le ski apporte sa pierre à un édifice plus imposant que jamais. Citons, parmi les autres événements épinglés par le sport français, la Ryder Cup de golf et l’Euro féminin de handball en 2018, l’Euro masculin de volley-ball (avec la Belgique, les Pays-Bas et la Slovénie) et le Mondial féminin de football en 2019, les championnats d’Europe d’athlétisme et de gymnastique artistique féminine en 2020.
Michel Vion, le président de la Fédération française de ski (FFS), tête de pont de la candidature, n’en avait pas fait mystère: « Nous sommes les favoris. C’est notre tour de recevoir l’événement. Notre dossier est solide, comme celui des Autrichiens. Nous avons longuement mené campagne. » Sans doute. Mais, preuve d’un sérieux changement de cap, le boulot a été mené jusqu’au bout, avec un subtil mélange de sens de la manœuvre, d’humilité et de souci du détail.
A Costa Navarino, où se tient le congrès annuel de la FIS, la délégation de Courchevel et Méribel s’est présentée en force, avec près de 45 personnes. Elle a animé son stand jusqu’au dernier moment. Elle a soigné sa présentation, l’avant-veille du vote, jouant de l’effet de surprise en faisant intervenir l’ancienne slalomeuse Claudia Riegler, épouse d’Antoine Dénériaz, le champion olympique de descente, originaire d’Autriche. Elle a choisi de s’exprimer en anglais.
Réaction de Michel Vion, cité par Ski Chrono: « C’est une belle victoire. Elle récompense le travail qui est fait depuis deux ans. Je me projette déjà sur la suite, pour moi ces Mondiaux peuvent être un catalyseur de beaucoup de choses en termes médiatiques, économiques, mais aussi en termes d’héritage pour les jeunes générations. C’est l’événement qu’il nous fallait pour entretenir la dynamique. »
Les Mondiaux de ski alpin se dérouleront du 9 au 16 février 2023. Les courses masculines se disputeront sur la piste des Jockeys, à Courchevel. Elle aura besoin d’un aménagement. Les épreuves féminines et la compétition par équipes se tiendront à Méribel, sur la piste du Roc de Fer, utilisée pour les Jeux d’Albertville en 1992. Les deux stations sont distantes de 17 km.
Un budget prévisionnel a été établi à 42 millions d’euros. La FIS en apportera la part la plus épaisse – 30 millions d’euros – au titre des droits de télévision et du marketing. Laura Flessel, la ministre des Sports, a déjà promis un engagement de l’Etat à hauteur de 7 millions d’euros.
Au cours de la même journée, le conseil de la FIS a procédé par vote à l’attribution des autres événements majeurs à venir. Il a choisi d’innover, en confiant à Planica, en Slovénie, les Mondiaux de ski nordique en 2023. Une première. La station slovène était en concurrence avec Trondheim, en Norvège. Les championnats du monde de ski freestyle egt snowboard en 2023 se dérouleront en un autre lieu inédit, les villes de Gudaui et Bakuriani, en Géorgie. Enfin, le tremplin de Vikersund, en Norvège, servira de décor aux Mondiaux de vol à ski en 2022.