Un pas en avant, deux pas en arrière. Rien n’est gagné pour l’eSport dans sa tentative de se frayer un chemin vers les Jeux. Sa route pourrait même s’avérer plus longue et tortueuse que prévu.
En juillet dernier, les sports électroniques croyaient bien avoir fait le plus difficile. Contraint par l’ampleur du phénomène de se pencher sur le dossier, le CIO a organisé à Lausanne le premier forum dédié à l’eSport. Une forme de victoire pour le monde des jeux vidéos, longtemps observé par le mouvement olympique comme une sorte d’ovni n’ayant rien à faire dans le décor.
Une première victoire, donc, même si le forum de Lausanne n’a pas délivré de ticket d’entrée aux sports électroniques.
Autre succès : la présence de l’eSport aux Jeux Asiatiques 2018, organisés actuellement à Jakarta et Palembang, en Indonésie. Six jeux figurent au programme, ils sont prévus pendant la deuxième semaine de l’événement. Dans le détail, League of Legends et le jeu mobile Arena of Valor ont été choisis par l’Association des comités olympiques asiatiques (OCA) dans la catégorie des jeux par équipes. StarCraft II, Hearthstone, Pro Evolution Soccer 2018 et Clash Royale composent la catégorie des jeux individuels.
Précision : ils figurent au programme des Jeux Asiatiques 2018, mais seulement en démonstration. Ils ne distribueront donc pas la moindre médaille. Une première approche, donc.
La suite s’annonçait sans temps mort. Avec, dans les tuyaux, une présence nettement plus visible de l’eSport aux Jeux Asiatiques en 2022, prévus en Chine, à Hangzhou. L’OCA l’avait annoncé dès l’an passé : l’eSport fera son entrée dans la place en qualité de discipline officielle, avec podiums, médailles, hymnes nationaux et tout le barnum. Une avancée derrière laquelle il n’est pas difficile de deviner le poids et l’influence du groupe chinois Alibaba, partenaire de l’OCA et sponsor du CIO au sein du programme TOP.
Mais, surprise, l’OCA semble vouloir maintenant tirer sur le frein à main. Son directeur général, Husain Al Musallam, a confié à l’AFP en marge de l’assemblée générale de l’OCA, le week-end dernier à Jakarta, que l’entrée de l’eSport à Hangzhou en 2022 était désormais à prononcer au conditionnel.
« Il n’est pas encore acquis que l’eSport figure officiellement au programme, a expliqué Husain Al Musallam. Nous avons besoin de pouvoir parler à une seule fédération internationale. A l’heure actuelle, elles sont beaucoup trop nombreuses à vouloir régir les sports électroniques. Elles doivent se réunir au sein d’une même instance dirigeante. »
Le coup d’arrêt est brutal. Quelques mois en arrière, l’eSport s’imaginait avancer désormais sur un terrain favorable, avec une prochaine étape à Hangzhou en 2022, puis une présence aux Jeux de Paris 2024. Mais le chemin s’annonce moins rectiligne.
Pour Paris 2024, il est désormais acquis que les sports électroniques ne pourront pas postuler comme sport additionnel, faute d’une reconnaissance par le CIO. Pour les Jeux Asiatiques en 2022, ils devront réunir leurs nombreuses composantes au sein d’une même institution pour sécuriser leur place. Mais la tâche s’annonce compliquée dans un univers où les fabricants, dont les investissements se chiffrent en millions de dollars, pourraient se montrer réticents à laisser la maîtrise de leurs produits leur échapper.
Réuni en assemblée générale à Jakarta, l’OCA a entériné le programme des Jeux Asiatiques en 2022. Dans sa version définitive, il devrait compter 40 sports. Le conseil exécutif de l’OCA a validé la présence des 33 sports des Jeux de Tokyo 2020, en laissant une porte ouverte pour un maximum de 6 disciplines supplémentaires présentes aux Jeux de Paris 2024. A cela, s’ajouteront un sport choisi par chacune des cinq zones géographiques du continent asiatique, plus deux autres disciplines désignées par le comité local d’organisation. L’eSport n’y figure pas. A lui de gagner sa place.