Mauvais signe ? L’avenir olympique de la boxe se joue ces deux prochains jours en Russie, le pays le plus vilipendé du mouvement sportif international. Le congrès de la Fédération internationale de boxe (AIBA) débute ce vendredi 2 novembre à Moscou. Il se poursuivra le lendemain. Avec, en tête de liste des festivités proposées aux délégués durant la journée de samedi, l’élection à la présidence de l’organisation.
Deux candidats vont se disputer le trône. Asiatiques tous les deux. A droite, l’Ouzbek Gafur Rakhimov, président par intérim depuis le mois de janvier, en attente d’un mandat complet et d’une reconnaissance plus démocratique. Dans l’autre coin du ring, le Kazakh Serik Konakbayev, médaillé d’argent chez super-légers aux Jeux de Moscou en 1980.
Samedi 3 novembre, les représentants des fédérations nationales ne devront pas seulement choisir entre deux candidats. Avant de déposer leur bulletin dans l’urne, ils devront se décider entre le risque et la prudence.
Dans la camp du risque, Gafur Rakhimov (ci-dessus). Présenté aux Etats-Unis comme un criminel impliqué dans différents trafics, l’Ouzbek figure en tête de liste des officiels jugés indésirables par le CIO. L’organisation olympique n’en veut pas et le répète sans retenir ses menaces. En cas de victoire, samedi à Moscou, Gafur Rakhimov pourrait se retrouver rapidement à la tête d’une fédération internationale exclue du mouvement olympique.
Dans un tel scénario, il n’est pas certain que la boxe soit retirée du programme des Jeux de Tokyo 2020. Le CIO ne souhaite pas pénaliser les athlètes en leur faisant subir les dérapages de leurs dirigeants. La discipline pourrait conserver sa place. Comment ? Mystère. Mais elle entrerait dans une période très incertaine.
Dans le camp de la prudence, Serik Konakbayev (ci-dessous). Le Kazakh préside la Confédération asiatique de boxe. Sa candidature à la présidence de l’AIBA a tenu à un fil. Elle avait d’abord été rejetée par la commission électorale, pour avoir été déposée avec un jour de retard. Mais le Tribunal arbitral du sport a remis le dirigeant kazakh dans la course.
Sur le papier, rien ne distingue réellement les programmes des deux hommes. L’un et l’autre promettent des jours meilleurs. Ils prétendent savoir comment sortir de la crise. Ils inondent les électeurs de chiffres, leur assurant une contribution à la hausse et des aides comme s’il en pleuvait.
Mais Serik Konakbayev possède dans sa manche un atout en plus : le risque de chaos. Il a répété sur son compte Twitter que sa priorité, une fois élu, serait de « réparer la relation avec le CIO et son leadership. » A Moscou, il prévient tous ses interlocuteurs qu’une victoire de son rival ouzbek pourrait entraîner l’AIBA dans un puits sans fond. « La menace du CIO est réelle », insiste-t-il.
Les faits plaident sa cause. Le mois dernier, le CIO a refusé à Gafur Rakhimov une accréditation pour les Jeux de la Jeunesse 2018 à Buenos Aires. Une démarche rarissime. Selon l’AFP, l’institution olympique aurait été jusqu’à lui adresser un courrier, au mois d’août, l’exhortant à ne pas se présenter à la présidence de l’AIBA. « Seuls les candidats bénéficiant d’une situation totalement claire peuvent briguer un mandat de président », a écrit Pâquerette Girard-Zappelli, la responsable de l’éthique au CIO.
L’Ouzbek est resté sourd aux menaces, mais il a perdu quelques alliés. L’Italien Franco Falcinelli, le président de la Confédération européenne, l’un des dirigeants à l’origine de la chute de CK Wu, l’ancien patron de l’AIBA, s’est rangé du côté de son rival kazakh.
Entre le chaos et la prudence, les électeurs devront choisir. Dans un tout autre sport, l’issue du scrutin ne ferait pas le moindre doute. Avec la boxe, tout est possible.