Nouvelle polémique au Canada. Elle concerne la prochaine édition des Jeux de la Francophonie, prévue à 2021 à Moncton et Dieppe, dans le Nouveau-Brunswick. Et, sans surprise, tourne autour de la question du coût de l’événement.
Selon la presse nationale, les autorités de l’état viennent de découvrir la réalité du budget des Jeux de la Francophonie 2021. Il se monte aujourd’hui à 130 millions de dollars canadiens (85,5 M€). Dans son dossier de candidature, en 2015, le Nouveau-Brunswick annonçait des coûts maîtrisés et un budget de 17 millions de dollars.
« Le chiffre de 130 millions de dollars serait apparu sur le bureau de l’ancien Premier ministre en mars dernier, a expliqué à l’Acadie Nouvelle le vice-Premier ministre et ministre responsable de la Francophonie, Robert Gauvin. Nous venons de le découvrir, il y a seulement deux semaines. D’où vient l’argent ? Comment sera-t-il dépensé ? Tout ça, je ne peux pas aller plus loin. »
Pour le gouvernement, une telle inflation s’avère hors de proportion. « Le budget initial qui avait été demandé au gouvernement précédent était de 7 millions de dollars, rappelle Robert Gauvin. Nous sommes prêts à aller jusqu’à 10 millions. C’est notre position. Il faudra travailler avec nos partenaires et débuter les négociations. »
Les villes de Moncton et Dieppe ont précisé dès la semaine passée qu’elles n’avaient pas l’intention de dépasser leur financement initial, établi au début du projet à 750.000 dollars pour chacune des deux villes-hôtes des Jeux. La communauté francophone, de son côté, s’était engagée à verser une aide de 3 millions de dollars.
Quant au gouvernement fédéral de Justin Trudeau, il a indiqué qu’il ne pourrait pas aller au-delà d’une aide couvrant au maximum la moitié du coût des Jeux. Une loi fédérale interdit en effet à Ottawa de dépasser, pour un tel événement, une aide équivalente à 50% du budget.
Qui paiera ? Mystère. Au cœur de la polémique, le comité d’organisation des Jeux de la Francophonie 2021 se refuse à répondre aux questions des médias. Il s’est contenté d’un communiqué, où il précise avoir été formé deux ans après la première estimation des coûts, déposée en 2015 à l’Organisation internationale de la francophonie (OIF). En clair, il ne serait en rien responsable d’un budget initial largement sous-évalué.
Une fois constitué, il s’est lancé dans un « plan d’affaires tenant compte de l’ensemble des dépenses liées à l’organisation des Jeux de la Francophonie en 2021. » Le résultat : une facture de 130 millions de dollars, presque huit fois supérieure aux prévisions.
Pour sa défense, le comité d’organisation souligne que les Jeux de la Francophonie pourraient se révéler un véritable jackpot pour les deux villes-hôtes, Dieppe et Moncton, et plus largement pour le Nouveau-Brunswick. Ils peuvent « engendrer des centaines de millions de dollars de retombées pour l’économie régionale », avance le communiqué.
Vraiment ? Au moment de la candidature, l’ancienne ministre de la Francophonie du Nouveau-Brunswick, Francine Landry, évoquait des retombées de 25 millions de dollars canadiens, dont 22 millions pour les deux villes-hôtes.
Quelques mois après le retrait de Calgary dans la course aux Jeux d’hiver 2026, l’affaite tombe au plus mauvais moment. Pour autant, les organisateurs se disent confiants et optimistes. « Nous sommes confiants de pouvoir collaborer avec les différents palier gouvernementaux et de parvenir à une entente pour assurer le succès des Jeux de la Francophonie 2021″, suggère Eric Mathieu Doucet, le président du comité d’organisation.
Le Canada renoncera-t-il à l’événement, faute de lui trouver un financement ? A ce stade, le scénario semble peu probable. Le bureau du Premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, se veut rassurant. Il souligne l’importance d’organiser les Jeux pour la province, pour le Canada toute entier, et pour les Acadiens, dans un contexte difficile pour les Franco-canadiens en général.
Il n’empêche, le chef du cabinet du Premier ministre, Louis Léger, a reconnu devant les médias canadiens que les nouvelles estimations des coûts dépassaient largement les moyens d’une petite province de 750.000 habitants, déjà lourdement endettée.
Reste à trouver les dizaines de millions manquants, ou à tailler à coups de hache dans les coûts. Mieux encore : à réussir sur les deux fronts.