Drôle de moment pour révéler un secret. Delphine Ernotte, la présidente de France Télévisions, a annoncé le 22 avril, en pleine soirée du lundi de Pâques, la signature d’un accord d’exclusivité avec le groupe américain Discovery pour la diffusion des Jeux de Paris 2024. Elle l’a fait sur Twitter.
La messe est dite, donc. Pour leur retour en France après un siècle d’attente, les Jeux olympiques d’été à Paris en 2024 seront accessibles gratuitement sur le service public. Toutes les compétitions seront proposées en clair, sur France 2 et France 3, ainsi que sur les chaînes 1ères pour l’outre-mer. En prime, une chaîne numérique dédiée sera spécialement mise en ligne par le groupe audiovisuel.
L’annonce peut surprendre. Par son timing, d’abord. Par ses acteurs, surtout. France Télévisions ne semblait pas en position de force pour rafler la mise. Le groupe doit faire face à une réduction budgétaire, imposée par le gouvernement. Sa présidente, Delphine Ernotte, n’a jamais caché qu’elle affecterait les achats de droits sportifs. Elle avait plusieurs fois laissé entendre que le coût des Jeux de Paris 2024, dont les droits ont été acquis par les Américains de Discovery en 2015 dans le cadre d’un achat global pour l’Europe pour la période 2018-2024 (1,3 milliard d’euros), n’était peut-être pas dans ses moyens.
A l’évidence, la direction de France Télévisions a cassé sa tirelire. Le montant de la transaction n’a pas été révélé. Mais Discovery avait suggéré dès la fin de l’année 2017 que les Jeux de Paris 2024 valaient, pour la France, « au moins le prix d’une Coupe du Monde de football. » TFI a déboursé 130 millions d’euros pour les droits du Mondial 2018 en Russie. Il n’est pas difficile d’imaginer que le chèque payé par France Télévisions compte lui aussi trois chiffres.
« Honneur et fierté de vous annoncer que nous avons signé avec Discovery un partenariat exceptionnel qui attribue à France Télévisions l’exclusivité des droits audiovisuels en clair et en direct pour les Jeux de Paris 2024″, a écrit Delphine Ernotte. La présidente du groupe a oublié de le préciser, mais l’accord porte également sur les Jeux d’hiver à Pékin en 2022. L’événement semble nettement moins important, voire anecdotique.
Interrogé par France Info, Tony Estanguet, le patron du COJO, a reconnu que l’accord avait été signé dès la semaine passée. Il avait été tenu secret.
TF1 et M6 avaient eux aussi planché sur le dossier. Le premier se disait intéressé par les cérémonies, par les sports collectifs (handball, football, basket), voire par les grandes finales de natation et d’athlétisme. Le second avouait étudier lui aussi la possibilité de faire une offre sur un lot réduit. Avec une telle concurrence, Discovery semblait avoir tout à gagner à découper le gâteau. Mais l’offre formulée par France Télévisions l’a convaincu de faire affaire avec un seul acteur du PAF. Au moins pour la diffusion en clair.
L’exclusivité acquise par le service public concerne en effet seulement la couverture gratuite des Jeux de Paris 2024. Propriété du groupe américain Discovery, le réseau d’Eurosport reste dans la course au titre des chaînes par abonnement. Il annonce même dès maintenant un dispositif sans égal : une couverture en direct de la première minute de la cérémonie d’ouverture à la dernière de la clôture, avec toutes les épreuves en intégralité. Au total, pas moins de 3.000 heures de diffusion. En prime, la création pour la durée des Jeux de Paris 2024 de plusieurs chaînes événementielles, chacune dédiée à une discipline en particulier. Très fort.
Reste une question : qu’en est-il des Jeux paralympiques ? A ce jour, elle reste encore sans réponse. Les droits de l’événement sont propriété du comité international paralympique (IPC). Les discussions viendront plus tard. Avec les mêmes acteurs. Ou pas.