Deuxième volet de notre entretien avec Tony Estanguet. Après avoir dévoilé ses priorités pour l’année 2020 et évoqué les échéances électorales dans la capitale française, le président de Paris 2024 se penche sur les questions du marketing. Il évoque aussi l’organisation du COJO. Et, enfin, se projette déjà dans l’après-CIO.
FrancsJeux : La recherche de partenaires privés semble plus difficile que prévu pour le COJO. Etes-vous en retard sur vos prévisions ?
Tony Estanguet : Nous avons toujours été très ambitieux sur la question du marketing. Mais en comparant notre situation actuelle avec celle des Jeux de Londres 2012 à pareille époque, on se rend compte que nous en sommes au même niveau, voire en avance, pour la signature des contrats de partenariat. Nous ne sommes pas en retard sur notre modèle de financement des Jeux. Il était important, pour moi, de continuer à donner de la valeur au projet, avant de se précipiter sur le marché. Aujourd’hui, le projet est plus fort : les nouveaux sports touchent une population plus jeune, qui peut intéresser les marques ; les épreuves de masse vont impliquer le grand public ; le label « Terre de Jeux 2024 » fait entrer un millier de collectivités dans l’éco-système de Paris 2024. Nous avons réussi à bousculer le modèle classique. Aujourd’hui, notre offre a plus de valeur qu’il y a un an.
A six mois des Jeux de Tokyo 2020, vous en êtes pourtant à seulement deux partenaires premium, BPCE et EDF, plus un autre sponsor de deuxième rang, la FDJ…
C’est vrai, mais nous avançons. Les choses se sont un peu accélérées à la fin de l’année 2019. Nous continuons à discuter avec quelques entreprises intéressées. Cela reste un défi. Lever 1,2 milliard d’euros en marketing, ça n’a jamais été fait en France. Mais l’appétit est en train de venir. Les marques commencent à nous solliciter en direct. Elles demandent les modalités pour devenir partenaires.
Les Jeux olympiques et paralympiques sont-ils proposés dans la même offre commerciale ?
Oui. Nous avons souhaité dès le départ ne pas dissocier les deux événements. Les partenaires de Paris 2024 s’engagent de facto sur les Jeux olympiques et paralympiques. Ils seront associés aux deux.
En ce début d’année 2020, quels regards portez-vous sur le COJO ?
Sur le plan humain, c’est une aventure extraordinaire. Bien sûr, on doit s’adapter tous les jours. Mais l’attractivité du projet est tellement forte que tout le monde veut sa réussite. Tout n’est pas parfait, on n’est pas toujours tous d’accord sur les décisions, mais en étant objectif, il faut reconnaître qu’on avance dans la bonne direction. Je suis très à l’aise avec toutes les décisions déjà prises. Nous réussissons à casser les codes, en allant sur des territoires inédits, tout en respectant le cahier des charges et la tradition d’un événement à l’identité sportive très forte.
Le COJO en est-il aujourd’hui où vous le souhaitiez, en termes de recrutement, d’équipes et de fonctionnement ?
Par mon passé de sportif de haut niveau, je suis drivé par le résultat. Aux temps de passage, nous sommes dans les clous. Nous sommes dans le budget, exactement là où c’était prévu, alors que la prévision a été établie en 2018. Même chose pour le recrutement des équipes. Le risque, pour un comité d’organisation, est de revoir ses ambitions à la baisse à cause des contraintes financières. Ça n’est pas notre cas. Au contraire, nous continuons à nous autoriser à sortir du cadre, pour apporter à Paris 2024 une touche française, tout en restant exemplaires sur la tenue financière et sur l’ADN sportif. Aujourd’hui, je suis très satisfait. Et nous avons une super équipe.
Vous allez devoir rendre votre tenue de membre du CIO au soir des Jeux de Tokyo 2020. Ce départ sera-t-il définitif ?
Oui. Je suis en train de tourner la page de cet épisode. Il a toujours été clair dans ma tête que je serai membre du CIO pour un mandat de huit ans. J’ai énormément appris, sur le sport international, sur la lutte antidopage, sur les règles de la charte olympique… Je dois maintenant me recentrer sur mon rôle de président du COJO Paris 2024. Je vais continuer à m’impliquer dans le mouvement olympique, mais désormais via cette position.
Vous regrettez de quitter le CIO ?
Non. Au contraire. Ce mandat a été un formidable tremplin et un formidable moyen d’apprendre. Je suis devenu président de Paris 2024 parce que j’ai été membre du CIO. Il n’est pas toujours compatible d’avoir plusieurs casquettes. Et je ne suis pas entré au CIO pour y faire carrière.