Au train où vont les choses, les dirigeants du football vont devenir plus célèbres que leurs joueurs. Un comité exécutif de la FIFA doit se réunir, aujourd’hui et demain à Zurich, au siège de l’institution. En temps normal, il n’aurait intéressé que ses participants. Cette fois, il fait l’actualité. La raison tient en cinq lettres: Qatar.
Au cœur des débats de cette réunion au sommet, la question du Mondial 2022 dans ce micro état du Golfe. La FIFA doit y discuter des accusations d’esclavagisme, portées par une enquête du Guardian faisant état de plus de 40 morts parmi les ouvriers népalais employés sur les chantiers de construction des stades de football. Surtout, elle doit débattre de la date de la Coupe du Monde au Qatar. Et sans doute prendre position sur un éventuel, osons dire probable, déplacement de l’événement en hiver, entre novembre 2021 et février ou mars 2022.
Le Mondial se jouera-t-il en hiver? La FIFA prendra-t-elle dès maintenant, neuf ans avant la compétition, une décision sur sa date? Comment s’organiseront les championnats nationaux et les coupes européennes en cas de changement de saison? Les réponses sont attendues pour ces prochains jours. Mais une chose est sûre: l’affaire du Mondial au Qatar fait des perdants. Et quelques gagnants.
Les perdants
Sepp Blatter. Le président de la FIFA porte comme un boulet, qu’il le veuille ou non, la responsabilité d’avoir accordé la Coupe du Monde 2022 à l’émirat. Il l’a avoué lui-même le mois dernier: cette décision a été influencée par des pressions politiques et économiques. Tout le monde le savait. Blatter l’a dit. Dans tous les cas, il ressortira affaibli de ce feuilleton qatari.
Le Qatar. L’état du Golfe était déjà montré du doigt comme pour l’épaisseur suspecte de son chéquier, la planète sport le suspectant d’acheter tout ce que bon lui semblait sans regarder à la dépense. Le voilà désormais accusé d’esclavagisme. C’est beaucoup. Son ambition d’accueillir un jour les Jeux olympiques risque d’en prendre un sacré coup. Et pourtant, le Qatar ne ménage pas ses efforts pour se montrer conciliant. Hier encore, le comité d’organisation du Mondial 2022 a fait savoir officiellement que le pays était prêt à organiser l’événement aux dates qui conviendraient au plus grand nombre: « Si la communauté internationale du football trouve un consensus pour déplacer l’événement à une autre date, nous sommes dans la mesure de nous adapter. Cela n’affecterait pas notre planning ni notre préparation ».
Les gagnants
Le CIO. La perspective d’une Coupe du Monde en hiver laissait planer le risque de voir le plus grand tournoi de foot sur la planète entrer en concurrence directe avec les Jeux d’hiver de 2022. Le CIO a fait savoir qu’il attendait au moins d’être consulté par la FIFA sur un éventuel changement de date du Mondial. Sepp Blatter l’a rassuré, jurant ses grands dieux que la quinzaine olympique de 2022 ne serait pas menacée. Le président de la FIFA en a profité pour rappeler qu’il était lui-même membre du CIO. Dans cette affaire, la FIFA fait déjà amende honorable.
Michel Platini. Le président de l’UEFA n’a jamais caché avoir voté pour le Qatar lors de l’attribution du Mondial 2022. Il n’a jamais fait mystère non plus de son désir de voir le tournoi déplacé en hiver. Les prochains jours pourraient lui donner raison. Surtout, Michel Platini a réussi à obtenir un consensus parmi toutes les composantes de l’UEFA. Les 54 fédérations européennes parlent le même langage dans cette affaire. Très fort.