La formule peut surprendre. Au moins sur la forme. Le CIO a dévoilé lundi 15 février, via un long communiqué, sa nouvelle feuille de route stratégique pour les cinq années à venir. Elle se cache derrière une identité mathématique : Agenda 2020+5.
Les plus avertis des subtilités du mouvement olympique l’auront compris : elle porte la marque de Thomas Bach. Sa marque et même, allez, sa détermination à marquer l’histoire du CIO et de son univers.
Elu à la présidence de l’instance olympique lors de la session de Buenos Aires en septembre 2013, le dirigeant allemand avait pondu sans tarder une première feuille de route : l’Agenda 2020. Elle devait accompagner le mouvement olympique jusqu’aux Jeux de Tokyo. Et, en filigrane, jusqu’à la fin du premier mandat de huit ans de Thomas Bach.
Désormais assuré de rempiler pour un deuxième – et dernier – bail de quatre ans, puisqu’il est seul candidat, le président du CIO prépare un avenir à plus court terme. Son deuxième Agenda mènera le mouvement olympique jusqu’en 2025, année où Thomas Bach rendra pour de bon les clefs du bureau présidentiel.
La nouvelle feuille de route du CIO s’inspire beaucoup de la première, mais en faisant le pari de l’ancrer dans le monde d’après. Elle dessine pour le mouvement olympique un avenir plus durable, plus connecté, plus tourné vers la jeunesse. Et, n’oublions pas les valeurs sûres, plus fortuné.
Les 15 recommandations contenues dans le document de 37 pages s’appuient sur les tendances susceptibles, selon le CIO, d’être « déterminantes dans le monde de l’après-coronavirus, sans oublier les domaines où le sport et les valeurs de l’olympisme peuvent jouer un rôle clé pour transformer les défis en opportunités. »
Elles tiennent en quelques mots : la solidarité, la croissance du numérique, la durabilité, la crédibilité, et enfin la résilience face aux conséquences financières et économiques de la pandémie de COVID-19.
Sans surprise, le CIO exprime une nouvelle fois dans l’Agenda 2020+5 sa détermination à rajeunir son public. Avec une cible, déjà maintes fois évoquée : le digital. Les sports virtuels seront pris en compte dans le programme olympique. Mais, attention, il n’est pas question des jeux vidéo. Pas encore.
L’instance le précise : les disciplines de l’eSport susceptibles d’entrer un jour aux Jeux devront s’accompagner d’un véritable effort physique. Les épreuves virtuelles, donc, telles que les fédérations internationales de cyclisme, d’aviron ou de tir à l’arc, par exemple, en ont proposées au cours des derniers mois.
Autre point fort : la représentation et les droits des athlètes. Prudent, le CIO reste flou sur les détails. Il se garde bien de suggérer une réforme en profondeur, voire une abrogation, de la règle 50 de la Charte olympique, selon laquelle les athlètes ne sont pas autorisés à exprimer aux Jeux une opinion politique, raciale ou religieuse. Mais l’une de ses recommandations préconise de mieux impliquer les athlètes dans la direction et la prise de décision des instances du mouvement olympique. Il est aussi proposé de créer un département des athlètes au sein du CIO.
A échéance 2025, le CIO aimerait également voir le calendrier international subir un toilettage en profondeur, en organisant par exemple les épreuves de qualification olympique à l’occasion d’événements rassemblant plusieurs sports. A l’évidence, le modèle des championnats d’Europe multisport, dont la deuxième édition doit se tenir à Munich en 2022, semble très apprécié à Lausanne.
Enfin, Thomas Bach suggère au mouvement olympique de plancher sur des « modèles innovants » pour trouver des revenus. L’une des pistes pourrait consister à mieux commercialiser les droits marketing des nombreuses épreuves de qualification aux Jeux.
« Lorsque nous avons adopté l’Agenda olympique 2020 en 2014, nous l’avons fait sous l’adage « changer ou être changé ». Cela reste vrai aujourd’hui, explique Thomas Bach. Le monde qui nous entoure continue d’évoluer. Rien n’illustre mieux cette situation que la pandémie mondiale actuelle de COVID-19 et ses conséquences pour la société. Aussi difficiles que les circonstances puissent paraître à l’heure actuelle, si nous tirons les bonnes conclusions, nous pouvons les transformer en opportunités. Pour ce faire, nous devons nous pencher sans tarder sur cet environnement futur. »
Selon le décompte du CIO, pas moins de 88 % des 40 recommandations de l’Agenda 2020 ont déjà été concrétisées. Sa version 2020+5 en dénombre seulement 15. Mais elles s’annoncent plus délicates à réaliser.
La nouvelle feuille de route stratégique du CIO sera soumise pour examen et adoption à la prochaine session de l’instance. Elle doit se dérouler du 10 au 12 mars en mode virtuel.