Son avenir olympique s’écrit toujours en pointillés, mais il ne pourra pas être reproché au pentathlon moderne de garder les deux pieds dans le même sabot. Ecartée provisoirement du programme des Jeux de Los Angeles 2028 – comme la boxe et l’haltérophilie – la discipline inventée par le baron Pierre de Coubertin s’active pour conserver sa place. Avec une obsession : prouver que la modernité n’est pas seulement l’une des deux composantes de son appellation.
Pour cela, son instance internationale, l’UIPM (Union internationale de pentathlon moderne), a choisi de laisser parler les athlètes. Mardi 25 octobre, elle en a réuni une généreuse poignée pour jouer les porte-paroles de la nouvelle discipline appelé à remplacer l’équitation, la course à obstacles, lors d’une conférence de presse en ligne organisée depuis son siège monégasque.
Les athlètes étaient invités à parler avec leurs mots et leur coeur pour défendre l’évolution du pentathlon moderne. Ils l’ont fait avec zèle et conviction, sans laisser le doute se glisser parmi leurs propos. Précision : tous avaient été soigneusement choisis par l’UIPM. Sans surprise, ils ont parfaitement tenu leur rôle.
Les opposants ? Le Britannique Joe Choong, champion olympique et du monde en titre, en est l’un des meneurs. Il n’a jamais fait mystère de son hostilité face à l’abandon de l’équitation. Mais il a confié à l’AFP ne pas avoir été « informé par l’UIPM » de la tenue de cette conférence de presse. « Je pense qu’en tant que champion olympique, j’ai le droit d’être invité à parler« , a-t-il suggéré.
A en croire une enquête menée auprès de 200 compétiteurs ayant participé au cours des derniers mois à l’un ou l’autre des quatre tests grandeur nature de la course à obstacles, la nouvelle discipline a séduit. Pas moins de 88 % d’entre eux se sont déclarés satisfaits ou très satisfaits de l’expérience.
Parmi les plus enthousiastes, la Française Elodie Clouvel. Vice-championne olympique en 2016 à Rio, la numéro 3 mondiale était présente à Monaco, mardi 25 octobre. Elle a reconnu ne pas encore avoir eu l’occasion de s’essayer à la course à obstacles. Mais selon elle, la roue tourne dans le bon sens.
« Pierre de Coubertin a inventé notre sport et l’a nommé ainsi pour qu’il reste moderne, a-t-elle expliqué. Bien sûr, le changement peut faire peur. Moi-même, j’ai eu à coeur d’apprendre l’équitation quand j’ai débuté. Mais il faut voir plus grand que soi-même. La modernité est l’ADN de notre sport. Je n’ai pas testé la course à obstacles, mais elle est inclusive, dynamique et visuelle. C’est le bon choix. Nous devons évoluer à chaque olympiade. Cette nouvelle évolution va dans le sens de la société. »
Même son de cloche chez l’Egyptien Yasser Hefni, le président de la commission des athlètes de l’UIPM. « La course à obstacles va nous renforcer, notamment dans la perspective des Jeux de Los Angeles 2028, car les gens feront le lien avec l’émission Ninja Warrior, l’une des plus célèbres aux Etats-Unis, suggère-t-il. Elle est diffusée sur NBC, qui est par ailleurs la chaîne des Jeux olympiques. Avec cette nouvelle discipline, nous allons toucher les jeunes. Nous pourrons également mieux développer le pentathlon moderne en Afrique, où la pratique de l’équitation est très restreinte. »
Shiny Fang, la secrétaire générale de l’UIPM, l’a expliqué : « Nous nous sommes engagés à fournir le matériel de course à obstacles à nos fédérations nationales, mais aussi aux organisateurs de compétitions. »
La suite ? Les premières étapes s’annoncent sans réelle difficulté. Le choix de remplacer l’équitation par la course à obstacles sera soumis au vote lors du prochain congrès de l’UIPM, prévu les 12 et 13 novembre. Sauf immense surprise, il sera adopté à une large majorité.
La nouvelle discipline sera ensuite intégrée aux compétitions de jeunes, dont les juniors, dès l’année prochaine. Pour les seniors, le grand saut attendra l’après Jeux de Paris 2024.
Mais l’épreuve de vérité se jouera à Lausanne. En cas d’adoption par le congrès, l’UIPM soumettra la course à obstacles à la commission du programme du CIO. Elle devra ensuite être validée par la commission exécutive, puis proposée au vote de la session à l’automne 2023. Pour le pentathlon moderne, ses dirigeants et ses athlètes, une autre forme d’épreuve à obstacles.