Parfait mois de novembre pour Jean-Luc Arassus (photo ci-dessus). En moins de deux semaines, le dirigeant français a été élu à la vice-présidence de l’Association internationale de surf (ISA), puis confirmé pour un deuxième mandat à la tête de l’instance européenne de la discipline (ESF).
A moins de deux ans des Jeux de Paris 2024, où le surf sera une nouvelle fois sport additionnel avant d’intégrer plus formellement le programme olympique quatre ans plus tard à Los Angeles, Jean-Luc Arassus s’impose comme l’un des acteurs majeurs de la discipline. Il a répondu aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux : Que représentent l’Europe et sa fédération – l’ESF – dans le monde du surf ?
Jean-Luc Arassus : Sportivement, un tiers des pays présents aux derniers championnats du monde, un quart des surfeurs qualifiés aux Jeux de Tokyo 2020 et la moitié des surfeuses, plus trois pays dans le top 10 à chacune des dernières éditions des Mondiaux. Sur le plan économique, l’Europe reste l’un des piliers de l’industrie du surf. Quant à l’ESF (European Surfing Federation), une instance historiquement menée par les Britanniques, elle compte aujourd’hui 23 pays affiliés. Le potentiel du surf en Europe est incontestable, notamment via le stand-up paddle, une discipline en fort développement dans les pays du nord.
Vous présidiez l’ESF de façon intérimaire depuis 2018. Vous en êtes depuis cette semaine le président de plein droit. Qu’elle est la priorité de ce nouveau mandat ?
Elle est double. La première mission est de tenter de réparer une injustice. Actuellement, les surfeurs de la zone panaméricaine disposent de deux opportunités de se qualifier aux Jeux olympiques. Leurs championnats multisports continentaux – les Jeux Panaméricains – où deux places sont mises en jeu, et les championnats du monde. Mais l’absence du surf aux Jeux Européens laisse aux athlètes du continent une seule chance de décrocher leur billet olympique : les championnats du monde. Le surf n’est pas au programme des Jeux Européens 2023 en Pologne, mais nous allons nous battre pour qu’il soit accepté dans l’édition 2027. Sa présence aurait du sens dans la perspective des Jeux de Los Angeles en 2028, où le surf ne sera pas sport additionnel, mais intégré au programme officiel. L’autre priorité de ce mandat sera, plus largement, d’obtenir une meilleure reconnaissance de notre sport et de l’ESF par les instances olympiques européennes.
Vous avez également été élu pour la première fois à la vice-présidence de l’ISA. Quel rôle souhaitez-vous y jouer ?
J’étais déjà membre du conseil depuis 2018. A ce titre, j’avais participé avec le président de l’ISA, Fernando Aguerre, et le directeur général, Robert Fasulo, à la campagne pour l’entrée du surf aux Jeux olympiques. Mon élection à la vice-présidence peut avoir un double effet. D’un côté, porter la voix de l’Europe et de ses pays au niveau international, face notamment aux pays de la zone panaméricaine ; de l’autre, incarner pour l’ISA un pilier important, l’Europe comptant des pays forts – Grande-Bretagne, France, Italie, Espagne, Suisse, Allemagne…. -, et une riche culture olympique.
Quel bilan tirez-vous des Jeux de Tokyo 2020, où le surf a fait ses débuts comme sport additionnel ?
Ils ont été organisés de main de maître par les Japonais. Le Japon est une place forte de notre sport, avec 4 millions de surfeurs. Bien sûr, les contraintes liées au COVID ont été lourdes, notamment l’absence de spectateurs. Fernando Aguerre avait prévu un festival du surf, en marge des compétitions, avec un village dédié. Tout a été annulé. Mais les compétitions ont été une réussite. Nous figurons dans le top 10 des disciplines les plus regardées tous supports confondus. Les conditions auraient pu être difficiles, en plein été, une période de l’année où les vagues ne sont pas toujours là. Mais le passage proche d’un typhon a amené de la houle. Au final, le bilan est très positif pour une première. Nous avions beaucoup de pression, il ne fallait pas se louper.
De votre point de vue, comment se présentent les épreuves de surf des Jeux de Paris 2024 prévues à Tahiti ?
Le choix de Tahiti, poussé par le COJO et par Fernando Aguerre, est très judicieux. Le site figure dans le top 3 des meilleures vagues du monde. Et les compétitions vont s’y dérouler au meilleur moment en termes de conditions. Les surfeurs ont pleinement conscience de la valeur que prendra une médaille sur une telle vague. Pour le reste, l’organisation sportive ne devrait pas poser de problèmes. Nous savons faire. Quant à l’aménagement du site, je fais confiance au COJO Paris 2024. Ils sont dessus, ça travaille. Je n’ai pas la moindre inquiétude.
L’entrée plus formelle du surf dans le programme olympique, à partir des Jeux de Los Angeles 2028, va-t-elle changer la donne pour votre discipline et pour ses instances ?
C’est certain. Le changement sera d’abord financier, puisque nous bénéficierons des subventions du CIO attribuées aux fédérations internationales des sports olympiques. Elles ne sont pas prévues pour les sports additionnels, malgré un très gros engagement et des dépenses importantes, notamment pour se rendre régulièrement à Lausanne. Mais l’entrée dans le programme olympique est aussi une reconnaissance de la valeur du surf, de son environnement, de sa communauté. Notre sport est reconnu comme indispensable aux Jeux. En aussi peu de temps, ça n’est pas rien. Notre présence dans le programme peut aussi permettre à certains pays d’atteindre le graal olympique, d’envoyer des athlètes, chose difficile jusque-là. Je pense au Salvador, par exemple. Enfin, la reconnaissance olympique renforce la position de l’ISA face au circuit professionnel, la WSL. Une position forte de notre instance internationale est très importante pour assurer la présence aux Jeux des meilleurs surfeurs du monde.