La boxe amateur ne reste pas les deux pieds dans le même sabot. La dernière olympiade a été marquée par l’entrée des femmes dans le programme des Jeux. La nouvelle s’annonce au moins aussi animée, avec l’arrivée des professionnels au sein de l’Association Internationale de Boxe Amateur, une réforme du corps arbitral et le lancement d’un vaste programme de développement. En exclusivité pour FrancsJeux.com, le président de l’AIBA, le Dr Ching-Kuo Wu, dévoile le futur de la boxe amateur. Interview – par Alain Mercier.
FrancsJeux : Vous venez de recevoir à Lausanne, au siège de l’AIBA, le nouveau président de la Fédération française de boxe, André Martin, et son vice-président, l’ancien champion olympique Brahim Asloum. Quel était l’objet de cette rencontre ?
Dr Ching-Kuo Wu : J’ai l’habitude d’adresser un message de bienvenue aux nouveaux dirigeants des fédérations membres de l’AIBA. La boxe française a changé de gouvernance. J’ai donc souhaité poursuivre cette tradition avec André Martin et Brahim Asloum, connaître leurs projets, leur assurer que l’AIBA serait à leurs côtés. Nous avons eu un excellent échange. André Martin connaît très bien la boxe. Il est impliqué dans son fonctionnement depuis de très longues années. Je suis persuadé qu’il peut ramener la France au plus haut niveau.
Au-delà du message de bienvenue, de quoi avez-vous parlé ?
L’AIBA ne manque pas de projets pour les mois et les années à venir. Je voulais en expliquer aux dirigeants français la nature et les détails. Nous avons, par exemple, évoqué ensemble le lancement en octobre 2013 de l’APB, la fédération créée par l’AIBA pour les boxeurs professionnels. J’aimerais que la France rejoigne cette structure inédite. L’APB offrira en effet la possibilité aux athlètes de passer professionnel sans quitter leur fédération nationale, au sein d’une organisation fiable et très structurée. La boxe française possède actuellement plusieurs champions qui pourraient y participer.
Avec le recul de quelques mois, quel bilan tirez-vous des Jeux olympiques de Londres ?
Un bilan excellent. Ces Jeux ont été, de l’avis général, parmi les plus réussis de l’Histoire. Et la boxe y a, je crois, rencontré un immense succès. Ces Jeux ont été marqués par l’arrivée dans le programme de la boxe féminine. Je sais que beaucoup se montraient sceptiques, avant les Jeux, sur l’intérêt de cette discipline. Mais les boxeuses ont su convaincre tout le monde. Nous travaillons déjà à développer la boxe féminine dans l’optique des prochains Jeux.
Malgré tout, les Jeux de Londres ont été marqués par certaines controverses dans l’arbitrage des combats…
C’est vrai. Mais nous avons su réagir en renvoyant chez eux, en plein tournoi, deux arbitres dont les décisions ont prêté à contestation. Mais il faut savoir, pour mieux comprendre les difficultés rencontrées par les juges, que le niveau de compétition ne cesse d’augmenter. Les combats sont de plus en plus serrés. A Londres, plusieurs d’entre se sont terminés avec seulement un point ou deux d’écart entre les deux boxeurs, chose impensable dans le passé.
Comment comptez-vous résoudre ce problème ?
Nous y travaillons. Nous organisons des séminaires consacrés à l’arbitrage, où sont étudiées et discutées les décisions passées et la manière de progresser. Nous allons créer un corps d’arbitres professionnels, salariés à temps plein par l’AIBA. Ils ne dépendront plus de leur fédérations respectives. Ils auront également pour mission de se rendre dans les différents pays membres de l’Association pour former les arbitres nationaux. Cette réforme de l’arbitrage sera effective pour les Jeux de Rio en 2016.
En ce début d’olympiade, quelle est votre priorité de président de l’AIBA ?
Ma priorité est double. La première concerne le lancement, en octobre 2013, de l’APB, le versant professionnel de l’AIBA. Je peux déjà vous annoncer que de nombreux sélectionnés olympiques des Jeux de Londres en feront partie. L’autre priorité est elle aussi assez immédiate : l’ouverture à l’automne prochain de l’académie mondiale de l’AIBA. Un projet d’envergure, destiné à permettre aux boxeurs et aux coachs de profiter d’une structure d’un très haut niveau pour se former et s’entraîner. Cette académie sera installée à Almaty, au Kazakhstan. Et elle sera déclinée sur le plan continental par des structures équivalentes, en Zambie pour l’Afrique, en Italie pour l’Europe, et peut-être en Chine pour l’Asie.
Verra-t-on un jour les grands noms de la boxe professionnelle participer aux Jeux olympiques ?
Nous en avons déjà le programme et le projet. Mais nous devons avancer pas à pas. Regardez la boxe féminine : personne n’y croyait, aujourd’hui tout le monde a apprécié ses débuts aux Jeux de Londres. Nous souhaitons suivre le même chemin pour la boxe professionnelle.
Un mot sur l’exclusion de la lutte du programme olympique. En votre qualité de membre du CIO, que pensez-vous de cette décision ?
Elle a été prise par la commission exécutive du CIO, après examen des travaux du groupe de travail consacré à l’évolution du programme. Mais la lutte n’est pas encore exclue des Jeux. Elle a rejoint la liste des sept sports qui postulent à leur entrée aux Jeux de 2020. Elle aura l’opportunité d’être choisie lors de l’Assemblée générale du CIO, en septembre 2013 à Buenos Aires. Rien n’est donc perdu.