Thomas Bach aime l’annoncer lorsque la question lui est posée : Paris 2024 marquera, l’an prochain, une « nouvelle ère » pour le mouvement olympique. Le président du CIO l’a encore répété en fin de semaine passée, lors d’une interview accordée à l’agence chinoise Xinhua en marge des Jeux Asiatiques à Hangzhou : les prochains Jeux d’été seront les plus durables et les plus inclusifs de l’histoire. Les premiers Jeux de la parité. La première édition marquée de l’empreinte de l’Agenda 2020+5 du CIO.
En attendant, Thomas Bach l’a constaté à chacune de ses sorties aux Jeux asiatiques 2023 (23 septembre au 8 octobre) : 10 mois presque jour pour jour avant Paris 2024, le présent s’écrit à Hangzhou. Et il préfigure, peut-être même plus encore que le rendez-vous olympique et paralympique l’an prochain en France, l’avenir des grands événements sportifs internationaux.
Un avenir où la haute technologie se mettra au service de la durabilité. Un avenir où le digital se glissera dans tous les recoins de l’organisation. Un avenir, enfin, où le sport ne sera pas seulement humain, mais se donnera aussi une dimension électronique.
Thomas Bach l’a résumé après la cérémonie d’ouverture, samedi 23 septembre au stade d’Hangzhou, une enceinte ultramoderne en forme de lotus pouvant accueillir 80.000 personnes : la soirée s’est révélée « une parfaite combinaison d’innovation numérique et de grâce humaine. »
Meilleur exemple : l’allumage de la flamme. Les Chinois l’ont voulu double, avec une version traditionnelle, à l’ancienne, et un modèle plus moderniste. Le flambeau « physique » a été allumé par un champion olympique de natation, le Chinois Wang Shun. Sa version digitale (photo ci-dessus) a bouclé un relais numérique d’un genre inédit, où plus de 100 millions de personnes se sont succédées sur la plateforme officielle pour porter la flamme depuis le 15 juin dernier.
Même tendance pour le feu d’artifice, tiré en fin de soirée au-dessus du stade. Il a été entièrement numérique. Le premier du genre pour un événement international multisport.
Thomas Bach a semblé apprécier. « Ces Jeux asiatiques vont établir de nouvelles normes, a commenté le dirigeant allemand. L’organisation mise en place à Hangzhou tire parti de l’expertise numérique de la Chine. Elle sera durable, en mettant l’accent sur la réduction de l’empreinte carbone et la gestion complète des déchets. »
Détail tout sauf anecdotique : Hangzhou abrite le siège mondial du groupe Alibaba, par ailleurs membre du programme mondial de marketing TOP du CIO.
Les Chinois ne s’en cachent pas : les Jeux asiatiques 2023 ont été conçus et préparés comme une vitrine des avancées de la Chine dans la haute technologie et l’intelligence artificielle. Dans les trois villages officiels, dédiés aux athlètes, aux médias et aux officiels techniques, les robots assurent la surveillance, la sécurité et l’animation. Ils proposent également des services bancaires, à l’image d’une ville où l’argent « papier » a quasiment disparu.
Au rayon transport, les organisateurs ont prévu un système de minibus sans conducteur pour assurer la liaison avec la ville voisine de Shaoxing, site des tournois de baseball et softball.
Dernière tendance : les sports électroniques. Volontiers avant-gardistes sur un terrain où le CIO avance avec une certaine prudence, les Jeux asiatiques ont ouvert depuis cinq ans la porte à l’eSport. Après un début remarqué, mais en démonstration, à Jakarta en 2018, les disciplines virtuelles sont sports à médailles pour la première fois cette année à Hangzhou.
Le programme des e-compétitions est étalé sur neuf jours. Il distribuera sept titres asiatiques, dont deux sur des jeux mobiles.
Observateurs attentifs : les organisateurs des prochains Jeux asiatiques, prévus en 2026 à Nagoya et dans la préfecture d’Aichi, au Japon. Hideaki Omura, le gouverneur d’Aichi, était présent à Hangzhou en fin de semaine. Il a poussé la porte du complexe d’eSport, construit spécialement pour l’événement. « L’eSport sera également un événement officiel en 2026, a-t-il confirmé, cité par Kyodo News. Nous allons essayer de le promouvoir de la même manière que nos collègues chinois. »
Le budget des Jeux asiatiques 2023 ? Mystère. Les organisateurs chinois n’ont jamais avancé le moindre chiffre. Mais les autorités locales, à Hangzhou, ont reconnu avoir dépensé sans compter pour le transport, les infrastructures et l’hébergement. Un chiffre circule : 200 milliards de yuans. Trente milliards de dollars. Nettement moins tendance.