A moins de six mois de l’ouverture (J – 170), l’affaire est malvenue. Selon l’AFP, le président du COJO Paris 2024, Tony Estanguet (photo ci-dessus), est l’objet depuis la semaine passée d’une enquête ouverte par le parquet national financier (PNF). Elle porte sur les conditions de sa rémunération.
Malvenue, vraiment. Mais, sauf improbable scénario, certainement pas de taille à faire dérailler une organisation, le COJO, et son président, lancés à fond dans les derniers tours de piste de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques. Paris 2024 n’en est pas à ses premières enquêtes. Les trois précédentes, ouvertes en juin dernier, qui portaient notamment sur des soupçons de favoritisme et détournement de fonds publics lors de l’attribution de marché, n’ont rien donné. La nouvelle suivra certainement le même chemin.
Les faits, d’abord. La rémunération de Tony Estanguet, en sa qualité de président du COJO, s’élève depuis la création du comité d’organisation en janvier 2018 à 270.000 euros bruts par an. A cela peut s’ajouter une part variable, dans une limite de 20 %, en fonction des performances commerciales du COJO, pour l’essentiel le partenariat et la billetterie.
Etablie à l’origine par un comité dédié, la rémunération de Tony Estanguet était susceptible d’évoluer à la hausse à partir de l’année 2020. Selon le COJO, elle n’a pas bougé. Les premières années, Paris 2024 lui remboursait également ses frais de voyage entre Pau, sa résidence familiale, et la capitale. Ca n’est plus le cas.
Précision : Tony Estanguet, à la différence des autres employés du COJO, dont les membres de la direction, n’est pas salarié. Il est rémunéré pour son rôle de président via une société, créée pour les besoins de la fonction. La dite société facture tous les mois au COJO des prestations non commerciales. Unique dans la maison, mais sans être exceptionnel.
Autre précision : malgré son statut d’association, le COJO Paris 2024 n’est pas soumis à la règle du plafond de la rémunération de ses dirigeants. Le comité d’organisation l’a détaillé mardi 6 février : « Le comité qui a le statut d’association loi 1901 poursuit un but d’intérêt général, mais n’a pas une gestion désintéressée, au sens fiscal du terme, notamment parce qu’elle est financée en quasi-totalité, à 96%, par des revenus commerciaux. Le caractère lucratif de son activité, lié à ses recettes commerciales – partenariat, billetterie, droits télé – lui a été confirmé par un rescrit fiscal. »
En clair, le COJO peut parfaitement rémunérer son président à la hauteur qu’il décide. Et le même président est tout autant dans son droit en facturant ses prestations par le biais de sa propre société.
Les réactions, maintenant. Sans surprise, elles n’ont pas tardé. Après avoir exprimé son « étonnement » à l’annonce d’une enquête ouverte par le PNF, le COJO s’est lancé dans une longue explication des règles et des chiffres, avec la volonté évidente d’étouffer dans l’oeuf tout début d’incendie.
Il explique que les « modalités de versement (de la rémunération de Tony Estanguet) ont été validées par le contrôleur général économique et financier, après consultation de l’URSSAF », que le « montant des factures inhérentes à cette rémunération fait l’objet d’un audit annuel ». Enfin, le COJO enfonce le clou en rappelant que sa « démarche ne correspond à aucune obligation juridique, mais répond à une volonté de transparence ».
Plus tard dans la journée, mardi 6 février, Tony Estanguet a tenu à réagir lui-même à l’annonce d’une enquête du PNF. En marge de l’inauguration de la piscine Annette Kellerman à la Courneuve, il a expliqué qu’il ne « décidait pas » lui-même de sa rémunération et de son cadre. « Je fais confiance à ce qui a été décidé à l’époque », a-t-il poursuivi. Avant de clore le sujet en assurant bien vouloir se « rendre disponible » pour « répondre aux questions ».