Beaucoup de bruit pour rien. Mais personne ne le regrettera. Après des mois de polémiques, des réunions à la pelle, une guerre des mots et un dialogue de sourds, l’affaire de l’expulsion des bouquinistes des quais de la Seine pour les besoins de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Paris 2024 a été envoyée aux oubliettes.
Sa conclusion a surpris tout le monde, à commencer par les intéressés. Personne ne l’avait vue venir.
Mardi 13 février, à 164 jours de l’ouverture des Jeux olympiques, une information de l’AFP confirmée plus tard par l’Elysée a révélé que les légendaires boîtes vertes des bouquinistes ne seraient finalement pas déplacées. La décision a été prise par Emmanuel Macron lui-même.
Face à l’absence d’un consensus, et à l’échec des discussions, le chef de l’Etat a tranché. « Le président de la République a demandé au ministre de l’Intérieur et au préfet de police de Paris que l’ensemble des bouquinistes soient préservés, et qu’aucun d’entre eux ne soit contraint d’être déplacé pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, a indiqué l’Elysée. Constatant qu’aucune solution consensuelle et rassurante n’a pu être identifiée avec ces acteurs, il leur manifeste son attention considérant qu’il s’agit d’un patrimoine vivant de la capitale. »
Retour en arrière. En juillet dernier, la préfecture de police de Paris déclenche la polémique en annonçant le déplacement des bouquinistes, dont la présence sur les quais hauts de la Seine pourrait constituer un risque pour la sécurité de la cérémonie d’ouverture. Il est précisé que seulement la moitié environ des boîtes en bois, certaines vieilles de plus d’un siècle, seront démontées et déplacées. Au total, un peu moins de 500 boîtes.
Très vite, l’affaire devient très médiatique. Un pétition est lancée pour leur maintien sur les quais. Elle a recueilli plus de 180000 signatures.
Les réunions se succèdent entre la préfecture de police, la mairie de Paris et les représentants des bouquinistes. Les deux premiers camps assurent vouloir prendre entièrement à leur charge les frais de démontage et déplacement, estimés à 1,5 millions d’euros. En novembre, un test de démontage est effectué. Il est jugé concluant par la préfecture. Mais les bouquinistes ne cèdent pas. Ils annoncent leur volonté de déposer un recours administratif.
L’affaire semblait dans l’impasse. Elle ne l’est plus. Mais certaines questions demeurent. La décision du président de la République est-elle liée à l’annonce récente du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, de réduire une nouvelle fois la jauge des spectateurs en accès gratuit ? Probable.
Initialement fixée à 500.000 personnes, puis réduite à 400 000, elle serait désormais encore revue à la baisse. Gérald Darmanin a évoqué le mois dernier le nombre de 200 à 220.000 spectateurs sur les quais hauts.
Toujours selon l’Elysée, Emmanuel Macron a « demandé que le dispositif de sécurité soit adapté en conséquence, les espaces concernés sur les quais hauts n’étant dès lors plus susceptibles d’accueillir du public pendant la cérémonie ». En clair, la préfecture de police devra revoir ses plans, pour laisser libres de spectateurs les zones occupées par les boîtes des bouquinistes. Avec 400 ou 500.000 personnes, le défi semblait impossible. Avec une jauge réduite de moitié, il pourrait être relevé.
Fin de l’histoire, donc. Mais les discussions vont se poursuivre. Pour preuve la réaction de Pierre Rabadan, l’adjoint à la Mairie de Paris en charge des Jeux olympiques et paralympiques, tout surpris d’apprendre par les médias une décision dont il ignorait tout.
« L’Etat a changé d’avis alors qu’il était à l’origine de ce choix, a-t-il confié au Parisien. Nous prenons acte de cette décision. Mais nous espérons que les dernières jauges annoncées par Gérald Darmanin avait été définies avec ce maintien des boîtes des bouquinistes. Car nous voulons que la cérémonie d’ouverture, qui se déroulera bien sur la Seine quoi qu’en disent certains, accueille le plus de monde possible. »