Le feuilleton devient hebdomadaire. Le nombre de ses épisodes reste incertain, mais une tendance se dégage quant à la suite de l’histoire : sauf retournement de situation, les athlètes russes suivront les Jeux olympiques de Paris 2024 à distance. Ils n’en seront pas acteurs, même habillés d’une tenue de neutralité.
Le dernier indice du refus de Moscou de répondre aux conditions imposées le CIO a été apporté par Oleg Matytsin. Le ministre russe des Sports a choisi la voie officielle, une interview à l’agence TASS, pour répéter une nouvelle fois la position du Kremlin. Elle se veut sans compromis.
« La Charte olympique – ses articles quatre et six – stipule que les sports doivent être exempts de discrimination et que les droits doivent être égaux indépendamment de l’appartenance religieuse, des préférences politiques, des croyances et ainsi de suite, a énoncé l’ancien président de la FISU. Il est inacceptable de suivre les recommandations du Comité international olympique et des fédérations internationales, lorsqu’elles franchissent la ligne rouge, en exigeant que les athlètes russes et biélorusses condamnent les politiques de leurs pays et les actions de leurs présidents. Nous ne ferons jamais cela et ne laisserons pas les droits des athlètes russes être bafoués. »
Sur le fond, rien de nouveau. La Russie continue d’opposer au CIO son refus des conditions de neutralité. Ses officiels brandissent la Charte olympique pour défendre leur bon droit. Refrain connu.
Mais la récente déclaration du ministre russe des Sports enfonce encore le clou. L’insistance d’Oleg Matytsin à répéter sans lassitude que les athlètes potentiellement qualifiés – ils sont encore très peu nombreux à moins de 150 jours de l’ouverture – ne se rendront pas aux Jeux de Paris 2024 s’ils doivent tourner le dos à leur gouvernement, suggère que la Russie ne cédera pas un pouce de terrain.
Oleg Matytsin a insisté : « Nous continuerons à faire pression (pour un respect de la Charte olympique). Nous attendons les décisions finales du CIO sur l’admission de nos athlètes aux compétitions. Mais nous prendrons une décision avec les athlètes et les fédérations sportives. »
Le ministre des Sports l’a par ailleurs expliqué : l’isolement du sport, et les perspectives de plus en plus lointaines de vivre les Jeux de Paris 2024 de l’intérieur, n’ont pas entraîné d’exode massif des athlètes. « Je pense que ceux qui ont pris la décision de changer de nationalité l’ont déjà fait, a confié Oleg Matytsin. Et leur transition n’a pas provoqué de turbulences dans la communauté sportive. Elle n’a pas causé de pénurie d’athlètes talentueux, de membres d’équipes nationales dans aucune des fédérations. »
En face, le CIO reste droit dans ses bottes. Lausanne se refuse à se lancer dans une guerre des déclarations. Mais les termes choisis pour rédiger sa longue explication de la question russe et biélorusse, publiée en octobre dernier sur son site Internet, régulièrement mise à jour depuis l’automne, vaut réponse aux attaque de Moscou.
« La participation aux Jeux olympiques n’est en aucun cas un droit humain et la récente modification de la Charte olympique n’y est pas liée, rappelle l’instance. Les conditions strictes que le CIO a fixées dans ses recommandations aux fédérations internationales pour la participation des athlètes individuels neutres détenteurs d’un passeport russe ou biélorusse aux compétitions internationales sont conformes à la Charte olympique. Elles ont été établies en réaction à la violation de la Charte olympique par les gouvernements russe et biélorusse. »
Le CIO conclut : « Nous rejetons fermement les accusations selon lesquelles ces mesures constituent une « discrimination ethnique ». »
Jamais, sans doute, la Charte olympique n’aura autant été brandie et débattue. Mais elle n’a jamais non plus autant servi d’alibi.